France Travail offre une tribune à Frontex pour de la « chasse » aux migrant·es

Début septembre, France Travail a organisé une réunion d’information avec l’agence européenne Frontex, dont le contenu a récemment été révélé par StreetPress. L’un des représentants de l’agence y a présenté le métier de garde-frontière comme une activité de « chasse », vantée auprès de « jeunes hommes » en quête d’action.

Ces propos ne relèvent pas d’un simple dérapage. Ils s’inscrivent dans un discours désormais banalisé qui déshumanise les personnes migrantes, les réduit à des cibles et promeut une vision viriliste de la force et du contrôle. Que ce registre soit employé par Frontex [1], déjà accusée à de multiples reprises de violations des droits humains (pushbacks illégaux, violences aux frontières), n’étonne guère. Mais qu’il trouve une tribune au sein de France Travail, service public censé accompagner toutes les personnes qui résident sur le territoire vers l’emploi – y compris les personnes migrantes, est particulièrement alarmant.

Cette dérive n’est pas isolée. Aux États-Unis, l’agence ICE (Immigration and Customs Enforcement) recrute massivement pour mettre en œuvre les expulsions promises par Donald Trump. Certes, les propos tenus lors de la réunion hébergée par France Travail n’ont pas atteint le degré outrancier des campagnes américaines, qui appellent ouvertement les futures recrues à expulser les « criminels et prédateurs » qui auraient « envahi » les États-Unis. Mais les points communs sont frappants : un recrutement massif au détriment de la formation (Frontex a abaissé son niveau d’études requis de bac +3 au baccalauréat, ICE a réduit ses formations de cinq à deux mois) ; le ciblage d’anciens militaires, recyclés dans le contrôle armé des migrations (la réunion France Travail était organisée avec Défense Mobilité, le service de reconversion du ministère des Armées) ; et plus largement, la banalisation de la violence aux frontières, présentée comme un défi exaltant.

Si France Travail a condamné les propos tenus lors de cette réunion, Frontex, elle, n’a rien désavoué.

Nous dénonçons la normalisation d’un vocabulaire et de pratiques contraires aux droits humains. Les frontières ne sont pas des terrains de chasse.

Paris, le 26 septembre 2025

[1« Frontex, agent intouchable du renseignement migratoire », Anna Sibley, Plein droit, n°145, juin 2025.

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Dernier ajout : vendredi 26 septembre 2025, 19:55
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