Contre la criminalisation des défenseurs des droits des étrangers

Ces derniers jours, la « machine à punir » les délits de solidarité a fonctionné à plein, rappelant qu’une épée de Damoclès pèse sur tous ceux qui dénoncent l’inhumanité des lois sur l’immigration : procès des « webmasters » de sites appelant au boycott des opérateurs participant à la construction de centres de rétention [1] ; procès des militants arrêtés au cours d’une manifestation à Calais pour la liberté de circulation ; fermeture d’un lieu de dialogue et de solidarité avec les migrants de Calais et interpellation de ses occupants [2] ; garde à vue de militants soupçonnés de dégradations de biens ou, tout simplement, d’opposition à la politique des rafles policières …

Le Gisti dénonce depuis longtemps le harcèlement moral, policier et judiciaire que subissent les militants menacés de poursuites en raison de « l’aide directe ou indirecte, apportée à l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers, d’un étranger en France » (art. L. 622-1 du Ceseda [3]). La répression dépasse maintenant de beaucoup l’application de ce seul article inique. La fermeture du local de No Border où étaient hébergés des exilés de Calais illustre l’imagination débordante des pouvoirs publics en la matière. Dans cette affaire, de simples arrêtés municipaux à la légalité douteuse, pris pour des motifs d’ « insalubrité », auront suffi à criminaliser les migrants et leurs soutiens, à clochardiser un peu plus encore les exilés et à couvrir les violences policières.

Selon une méthode désormais bien rôdée, les délits d’outrage, d’injure, de diffamation ou de rébellion sont utilisés pour poursuivre et condamner les personnes qui protestent contre la politique menée à l’égard des étrangers [4]. Plus grave encore, l’arsenal « anti-terroriste » a également été mis en branle à plusieurs reprises contre des mouvements luttant pour la fermeture des centres de rétention et la liberté de circulation, avec à la clef des arrestations musclées et des détentions provisoires dépassant parfois une année.

Les militants arrêtés ou poursuivis en ces occasions ont été déclarés coupables avant même d’avoir été jugés, à coup de déclarations haineuses et diffamatoires. Le ministre de l’immigration a qualifié de « violents » les militants de No Border sur la seule base de leur engagement en faveur des exilés. On voit réapparaître des catégories de pensée que l’on croyait révolues. Pour le porte-parole de l’UMP, l’altermondialisme relève d’ « idées antinationales », et « certaines associations ou pseudo-associations » doivent « rendre des comptes à la justice ». Avec les récentes actions policières contre des militants de la liberté de circulation, ses vœux sont en passe d’être exaucés.

Le Gisti dénonce cette nouvelle forme de chasse aux sorcières qui prétend ériger en délit d’opinion la revendication d’une autre politique migratoire. Il réaffirme son soutien aux « délinquants de la solidarité », et au-delà, à tous ceux qui défendent l’égalité des droits entre nationaux et étrangers et la liberté de circulation.

Le 25 février 2010

[3Voir notre dossier « Les délits de la solidarité » : http://www.gisti.org/delits-de-solidarite

Voir notre dossier « Les délits de la solidarité »

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Dernier ajout : mercredi 3 mars 2010, 19:29
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