FTDES - Forum Tunisien pour les Droits Economiques et Sociaux

Le camp de Choucha : une prison pour les migrant·e·s de Méditerranée ?

Le 18 mars 2012, 74 personnes dont 13 femmes parties de Libye se trouvent dans une embarcation en difficulté en eaux internationales à 50 miles (93 Km) de Lampedusa, 53 miles (98 Km) de la Tunisie et 120 miles (222 Km) de Malte. Elles sont secourues par des pêcheurs qui donnent immédiatement l’alerte aux secours. Les autorités maltaises et italiennes refusent à la fois d’assister les personnes naufragées et de les accueillir dans leurs ports. C’est finalement un navire militaire tunisien qui les transfère au port de Sfax. Selon les autorités maltaises, cette intervention de la marine tunisienne fait suite à un accord entre les gouvernements italien et tunisien. Les migrant-e-s sont ensuite emmené-e-s au camp de réfugiés de Choucha géré par le Haut Commissariat aux Réfugiés de l’ONU (HCR) à la frontière libyenne.

Face à ces faits, nous constatons que :

  • Malte et l’Italie continuent de se rejeter la responsabilité des opérations de secours dans le Canal de Sicile, méprisant l’enjeu vital de l’assistance en mer pour les personnes qui s’y trouvent en détresse
  • Les personnes naufragées, toutes Somaliennes, pouvaient être en besoin de protection internationale à Malte ou en Italie. Or, ces Etats de l’Union Européenne ont, d’un commun accord, organisé leur renvoi depuis les eaux internationales par un navire militaire tunisien. Cela alors même que la Cour Européenne des Droits de l’Homme a récemment condamné l’Italie au sujet des renvois collectifs en haute mer par le biais de sa marine militaire et que la Tunisie n’est pas à l’heure actuelle pourvue d’un système d’asile.
  • Les survivant-e-s du naufrage ont été placées dans le camp de Choucha. Cela sans procédure judiciaire en Tunisie ni qu’aucune disposition légale ne permette leur privation de liberté. De plus, la situation à Choucha s’aggrave et l’avenir des personnes qui s’y trouvent y est incertain.

Nous dénonçons fermement :

  • L’irresponsabilité des autorités italiennes, maltaises et tunisiennes et la perpétuation de l’espace Méditerranéen comme un espace de non droit, où les intérêts populistes et sécuritaires valent plus que les vies humaines.
  • Le double discours de la part des États, confondant sauvetage en mer et sécurisation de cet espace, sous la bonne garde du HCR qui accepte de fait de devenir le gardien d’un camp pour étrangers au service des autorités tunisiennes et européennes.

Nous demandons en conséquence :

  • La prise en charge immédiate et sans négociations du secours et de la protection internationale des boat people du canal de Sicile par les États de l’Union Européenne lors des naufrages qui se produisent au large de leurs côtes.
  • La transparence de la part des autorités tunisiennes et européennes en ce qui concerne leurs accords et leurs agissements concertés vis à vis du secours en mer des boat people dans le Canal de Sicile
  • La transparence de ces mêmes autorités ainsi que des organisations internationales concernées (OIM, HCR...) concernant les lois et accords migratoires en cours de préparation en Tunisie.
  • La libération de l’ensemble des personnes étrangères privées de liberté en Tunisie sans qu’aucune disposition légale ne le justifie, que cela soit dans le camp de Choucha ou dans d’autres lieux d’enfermement.
  • La liberté de circulation pour toutes et tous
Le 21 mars 2012

Forum Tunisien pour les Droits Economiques et Sociaux


[retour en haut de page]

Dernier ajout : jeudi 22 mars 2012, 19:55
URL de cette page : www.gisti.org/article2665