action collective
Lettre au Procureur général de la Cour d’appel de Douai
Le parquet de Boulogne-sur-mer doit cesser d’être le complice du harcèlement policier contre les migrants à Calais
Cour d’appel de Douai
Paris, le 28 novembre 2012
Monsieur le Procureur général,
Nos organisations viennent de prendre connaissance de la décision - accablante pour les autorités de police - du Défenseur des droits du 13 novembre relative au harcèlement policier dont sont victimes les migrants dans la région de Calais.
Le Défenseur des droits relève ainsi que « des contrôles d’identité, des interpellations et des conduites au commissariat de Coquelles sont souvent effectuées sur une même personne, dans un délai rapproché et que de telles interventions ont souvent lieu à proximité des lieux de repos et de soins… ».
Or, selon ce même rapport, ces contrôles d’identité interviennent soit sur la base de réquisitions du parquet local, soit sur le fondement d’infractions bénignes (traversée de chaussée hors des clous, crachat dans la rue …) - prétexte à la vérification de leur situation administrative - ne faisant l’objet d’aucun procès-verbal de contravention.
Pour mémoire, selon les chiffres fournis par la PAF au Défenseur des droits, sur 13 000 interpellations consécutives à ces contrôles d’identité, 662 personnes ont fait l’objet d’une mesure d’éloignement …
Par ailleurs, la décision du Défenseur des droits constate que de nombreux migrants se plaignent du non-respect de leurs droits dans les procédures de vérification d’identité, notamment du fait du refus de remise du procès-verbal prévu par l’article 78-3 du code de procédure pénale.
Enfin, cette décision objective des pratiques inadmissibles de la part des forces de l’ordre et/ou de la municipalité, telles que dégradation ou destruction des biens des personnes contrôlées ou expulsions en dehors de toute procédure légale.
Ces constatations vous concernent doublement.
En délivrant de manière répétée et abusive des réquisitions aux fins de contrôle d’identité – à l’intérêt plus que marginal en termes de lutte contre la délinquance (cf les chiffres qui précèdent) – sans assurer aucun contrôle sérieux de l’usage qui en est fait par les services de police, le parquet de Boulogne-sur-mer se rend complice des pratiques scandaleuses et humiliantes dénoncées par le Défenseur des droits.
En ne donnant pas suite aux plaintes déposées pour les faits de dégradations de biens que les migrants ou les associations dénoncent, ce parquet rend possible la poursuite de comportements pénalement répréhensibles.
Nous vous demandons en conséquence, par le présent courrier rendu public compte tenu des enjeux, de bien vouloir prendre toute mesure utile pour que le parquet de Boulogne-sur-mer cesse d’être le complice de pratiques que nul ne peut plus désormais prétendre ignorer.
Nous vous remercions de bien vouloir nous informer des mesures prises à cet effet, en vous précisant que nous n’entendons pas relâcher notre vigilance en faveur du respect des droits élémentaires des étrangers à Calais.
En l’attente, veuillez être assuré, Monsieur le Procureur général, de notre parfaite considération.
Matthieu Bonduelle, président du Syndicat de la magistrature
Organisations signataires :
- Auberge des migrants (Calais)
- Association européenne pour la défense des droits de l’homme (AEDH)
- Calais Migrant Solidarity
- Collectif de soutien des exilés (Paris)
- Emmaüs International
- Fédération des associations de solidarité avec les travailleur·e·s immigré·e·s (Fasti)
- Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH)
- Fraternité Migrants Bassin Minier 62
- Groupe d’information et de soutien des immigré·e·s (Gisti)
- Ligue des droits de l’homme
- Marmite aux idées (Calais)
- Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap)
- Réseau euro-méditerranéen pour les droits de l’homme (REMDH)
- Salam Nord-Pas-de-Calais
- Syndicat des avocats de France (SAF)
- Syndicat de la magistrature
- Terre d’errance (Norrent-Fontes - 62)
Documents joints :
-
PDF de cette lettre (PDF - 56.4 ko)
-
Décision du défenseur des droits, 13/11/2012 (PDF - 590.7 ko)
Voir notre dossier « Contrôles d’identité et interpellations »
Partager cette page ?