Référé-liberté contre une OQTF prononcée à Mayotte en violation du droit à un recours effectif
Le Gisti, conjointement avec la Cimade, l’ADDE et le SAF sont intervenus volontairement à l’appui d’une requête en référé-liberté déposée devant le Conseil d’État, en appel d’une ordonnance de référé rendue par le tribunal administratif de Mayotte, le 19 juin 2024. La Défenseur des droits a de son côté déposé des observations.
Le 16 juin, à l’issue d’un contrôle d’identité, le préfet avait pris un arrêté portant OQTF sans délai de départ volontaire et décidé d’un placement en rétention dans un local de rétention administrative. Transféré tardivement au CRA de Pamandzi, l’intéressé n’avait pas été en mesure de déposer un recours et faire état de sa situation personnelle alors qu’il est marié civilement à une ressortissante comorienne, admise au séjour de longue date en qualité de mère d’enfants français et que le couple a deux enfants. Le lendemain à 8h40, il quittait les locaux du CRA de Pamandzi en vue de son éloignement. À 11h13 son avocate déposait une requête en référé liberté afin de suspendre l’exécution de la mesure d’éloignement. A 11h26, le préfet de Mayotte était informé de cette saisine. Le même jour à 12h00, l’intéressé était éloigné vers les Comores.
Dans un premier temps, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte avait estimé qu’il n’y avait plus lieu à statuer sur la demande de suspension de l’OQTF, avait en revanche suspendu l’interdiction de retour mais rejeté la demande tendant à ce qu’il soit enjoint d’organiser le retour du requérant aux frais de l’État. Pour le juge de première instance, l’administration n’avait pas porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit à un recours effectif dès lors qu’à l’heure de la saisine du tribunal l’intéressé avait déjà quitté le centre de rétention. Le juge des référés a donc fait mine de croire que l’heure de départ du CRA mentionnée sur le registre correspondait à l’heure de départ de l’intéressé du territoire.
Par une ordonnance du 31 juillet 2024 e juge des référés du Conseil d’État a suspendu l’OQTF et confirmé la suspension de l’interdiction de retour, mais il a lui aussi refusé d’enjoindre à l’État d’organiser le retour du requérant en France. Cette « suspension doit permettre à l’intéressé de solliciter la délivrance d’un document l’autorisant à retourner à Mayotte ».
Le juge des référés considère donc que le préfet de Mayotte a mis à exécution son arrêté avant que l’intéressé ne forme sa demande de suspension. Partant il n’y a pas de violation du droit au recours effectif. Pour former sa conviction, le Conseil d’Etat s’est fondé sur une note en délibéré communiquée par le ministère après la clôture de l’instruction et qui n’a pas été portée à la connaissance du conseil de l’intéressé en violation du principe du contradictoire.
Une requête sera prochainement déposée devant la Cour européenne des droits de l’homme.
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