Conditions d’éloignement des mineurs à Mayotte (Moustahi c. France)

1/ L’affaire devant la Cour
L’affaire était en instance devant la Cour européenne des droits de l’homme depuis janvier 2014. Communiquée en 2017, elle concernait une famille comorienne résidant à Mayotte. Le père était en situation régulière, les deux enfants sont nés à Mayotte. La mère, renvoyée aux Comores avec les deux enfants, revient irrégulièrement à Mayotte. Les deux enfants tentent à leur tour la traversée sur une kwassa, en vue de rejoindre leurs parents. Les dix-sept personnes présentes sur l’embarcation sont interpellées en mer, placées en rétention, les deux enfants sont rattachés arbitrairement à des adultes et renvoyés, alors que leur père s’était présenté sur place.

Le tribunal administratif de Mayotte rejette la requête en référé pour défaut d’urgence. Le Conseil d’État rejette à son tour le recours, au vu de l’assurance donnée par l’administration que la demande de regroupement familial sera examinée dans les meilleurs délais.

La saisine de la Cour fait valoir la violation des articles 3, 5§1, 5§4 et 8 de la convention, de l’article 4 du protocole n° 4 (interdiction des expulsions collectives) et enfin de l’article 13 (absence de recours effectif).

S’agissant d’une affaire de principe importante, car les pratiques mises en lumière ici sont constatées quotidiennement à Mayotte, le Gisti, la LDH et la Cimade ont adressé à la cour une tierce intervention le 25 janvier 2018.

La Cour a rendu sa décision le 25 juin 2020. Elle a conclu à la violation de l’article 3 du fait des conditions de la rétention des enfants et des conditions de leur renvoi vers les Comores ; à la violation des articles 5§1 et 5§4 ; à la violation de l’article 8 et finalement de l’article 4 du Protocole n° 4 qui interdit les expulsions collectives.

La Cour, au titre de la satisfaction équitable, a condamné la France à verser 22 500 euros pour le père et 10 000 euros pour chacun des enfants.

2/ Le suivi d’exécution
Dans le cadre de l’examen du suivi d’exécution de l’arrêt Moustahi, le Comité des ministres, devant lequel le Gisti ainsi que la Défenseure des droits avaient produit des observations, s’est inquiété, dans une décision rendue à l’occasion de sa réunion des 8 et 9 mars 2022, de ce que la pratique consistant à rattacher arbitrairement des enfants mineurs à des adultes semblait ne pas avoir cessé et a demandé à la France d’informer le Comité des mesures adoptées pour y mettre fin.
Toujours dans le cadre de l’examen du suivi d’exécution, le Comité des ministres a, par une décision rendue à l’issue de sa réunion des 11-13 juin 2024, invité le gouvernement français à « adopter des mesures concrètes complémentaires afin d’assurer le respect par toutes les autorités des exigences de l’arrêt de la Cour et du Conseil d’État quant aux vérifications à réaliser avant tout éloignement forcé de mineurs ».
Le 25 avril 2025, le Gisti, l’ADDE, le SAF et La Cimade ont produit des observations conjointes devant le Comité des ministres. Ce quatrième jeu d’observations répond à un plan d’action présenté par le gouvernement français le 20 mars 2025. Une décision devrait être rendue dans les semaines à venir.

CEDH- décision communiquée
Tierce intervention Cimade-Gisti-LDH
CEDH, 25 juin 2020
Observations du Gisti sur l’exécution de l’arrêt Moustahi
Observations du DD sur l’exécution de l’arrêt Moustahi
Décision du conseil des ministres sur l’exécution de l’arrêt Moustahi -mars 2022
Décision du Conseil des ministres - juin 2024
Observations Gisti-Cimade-Adde-Saf, 25 juin 2025

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Dernier ajout : lundi 28 avril 2025, 16:46
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