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ARGUMENTAIRE

Pensions des anciens combattants étrangers
Analyse
de la délibération de la Halde
du 9 octobre 2006
Présentation succinte

03/11/2006 — Dans une délibération du 9 octobre 2006, la Halde a enfin admis que la législation française repose sur « une discrimination à raison de la nationalité » dans le calcul des pensions des anciens combattants et fonctionnaires des anciennes colonies. Elle recommande au gouvernement « de prévoir un dispositif de revalorisation » de l’ensemble de ces prestations (pensions civiles et militaires d’invalidité, retraite du combattant, pensions civiles et militaires de retraite, pensions de réversion, etc.) et non des seules « prestations du sang ».

Cette recommandation intervient alors même que le gouvernement a annoncé, lors du conseil des ministres du 27 septembre 2006, la revalorisation des seules retraites du combattant et pensions militaires d’invalidité. Une mesure très partielle, dénoncée par les associations, qui ne concerne que deux pensions sur la demi-douzaine de prestations allouées aux dizaines de milliers d’anciens fonctionnaires civils et militaires des anciennes colonies, qui continueront à être gelées.

Allant délibérément à l’encontre de la décision du Conseil d’Etat du 18 juillet 2006, la Halde s’appuie sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et de la Cour de justice des communautés européennes pour condamner le dispositif français. Elle relève en effet que malgré la position adoptée par le Conseil d’Etat « il n’en reste pas moins que l’existence d’une différence de traitement à raison de la nationalité pose difficulté au regard de la Convention européenne mais aussi des accords euro-méditerranéens d’association entre la communauté européenne et les pays du Maghreb ». Dans une ordonnance du 13 juin 2006 Echouikh, la Cour de justice des communautés européennes avait en effet estimé contraire au principe d’égalité de traitement garanti par ces textes la législation française, ce que le Conseil d’Etat avait ignoré.

La Halde constate aussi que la législation introduit « une condition de résidence qui n’est pas applicable aux ressortissants français » au moment de la liquidation des pensions, ce qui constitue une discrimination indirecte.

Si les associations réclamantes se félicitent de cette recommandation, elles regrettent que la Halde, saisie dès novembre 2005 par le Gisti et le Catred, ne se soit pas aussitôt mobilisée sur ce dossier, dès lors qu’il s’agit d’une des discriminations légales les plus anciennes [1], les plus massives (plusieurs dizaines de milliers de victimes) et qui a donné lieu à des milliers de décisions judiciaires depuis des décennies dont certaines de principe (notamment l’arrêt Diop en 2001) et que la mission de la Halde est de porter assistance aux victimes de discriminations. Nul n’ignore pourtant que le temps joue en défaveur des anciens combattants étrangers, victimes, comme les Chibani-a-s, de la désinvolture des politiques publiques à l’égard des vieux immigrés.

Ni la décision de la Cour de justice des communautés européennes du 13 juin 2006, ni l’arrêt du Conseil d’Etat du 18 juillet 2006, ni les nombreux communiqués associatifs sur cette question n’ont décidé la Halde à porter assistance à ces victimes, probablement trop discrètes et invisibles médiatiquement.

La Halde n’a même pas pris la peine d’intervenir au soutien de la cause des anciens combattants devant le Conseil d’Etat alors même que le Gisti l’avait expressément invitée à le faire et qu’elle a disposé de sept mois pour le faire. L’article 13 de la loi du 30 décembre 2004, modifié par la loi du 31 mars 2006, l’autorise pourtant à produire d’office des observations en justice dans toutes les affaires relatives aux discriminations.

Il a fallu attendre la médiatisation qui a entouré la sortie du film Indigènes, et les annonces du Président de la République et du conseil des ministres le 27 septembre pour que la Haute autorité sorte enfin de sa torpeur. Sa prise de position apparaît davantage comme une victoire du show business que comme celle du droit. D’ailleurs, saisie également en novembre 2005 par le Gisti et l'association Harkis et Droits de l'Homme à propos de discriminations comparables en matière d’attribution de prestations pour les harkis et leurs familles, la Halde n’a toujours par réagi. Les discriminations subies par certains de ces harkis et de leurs familles ne sont manifestement pas encore assez médiatiques.

On peut également déplorer que la Halde n'ait pas voulu répondre à une demande expresse qui lui était faite à propos des pratiques d'obstruction des administrations et des blocages opposés aux anciens fonctionnaires et aux anciens combattants non résidents en France, qui empêchent ces derniers de pouvoir effectivement recourir à la justice et faire valoir leur droit. Il est à cet égard inadmissible que les tribunaux, qui ont manifestement reçu des instructions en ce sens, rejettent systématiquement les demandes d'aide juridictionnelle dès lors qu’il s'agit de recours d'anciens combattants étrangers.

Ayant constaté le caractère discriminatoire de la législation et demandé au gouvernement d’y mettre fin, la Halde sera, comme le prévoit la loi, consultée sur les projets de réforme qui seront engagés devant le Parlement sous la forme d’amendements à la loi de finances pour 2007.

Dans la précipitation, le gouvernement sera donc obligé à un nouveau recul sur une condition de nationalité dénoncée de longue date mais qu’il a délibérément ignorée jusque là. A l’initiative du Gisti, a en effet d’ores et déjà été reconnu par la Halde le caractère discriminatoire :

Il est temps que la Halde se saisisse de manière globale de la question des droits et des emplois fermés aux étrangers, dont l’inventaire a été, de longue date, réalisé par plusieurs rapports et études, notamment dans la note n°1 du Geld, afin de mettre fin à l’ensemble du secteur d’exclusion des étrangers.

Gisti, 3 novembre 2006


Voir aussi


Notes

[1] Les pensions ont été cristallisées :

  • par l’article 170 de la loi de finances pour 1959 (ordonnance n°58-1374 du 30 décembre 1958) pour les ressortissants des pays d’Indochine ;

  • par l’article 71 de la loi de finances pour 1960 pour ce qui concerne les autres Etats ayant accédé à l’indépendance, étendu par l’article 14 de la LFR pour 1979 (n°79-1102 du 21 décembre 1979) ;

  • par l’article 26 de la LFR pour 1981 (loi n°81-734 du 3 août 1981) pour les Algériens.

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Dernière mise à jour : 3-11-2006 17:16.
Cette page : https://www.gisti.org/ doc/argumentaires/2006/enfants-en-cr/analyse.html


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