Féminicides : refuser le prisme xénophobe

Tous les deux jours en France, une femme est tuée. Toutes les 2 min 30 une femme est violée ou subit une tentative de viol. La plupart du temps, ces crimes sont accueillis par un silence assourdissant de la classe politique.

La mort d’une jeune femme dont le meurtrier présumé était sous le coup d’une OQTF a suscité, elle, de nombreuses réactions.

Les un·es ont pensé pouvoir tirer profit de ce drame pour appeler à un énième renforcement de l’arsenal législatif contre les personnes étrangères. Les autres, le considérant suffisant, ont appelé à identifier le dysfonctionnement de la chaîne administrative ou pénale qui a permis la remise en liberté de cet étranger avant son expulsion vers le Maroc.

Qui pour faire remarquer que la polémique autour de cette expulsion ne sert qu’à détourner l’attention de la question cruciale, qui se pose universellement, des violences faites aux femmes ?

Qui pour affirmer que la nationalité de l’auteur ou de la victime de tels actes n’ajoute ni ne retranche rien à l’horreur qu’ils suscitent légitimement ?

À vouloir imposer une grille de lecture xénophobe des causes de cet assassinat, où la nationalité de son auteur écrase toute autre considération et obère toute capacité à penser l’enchaînement des facteurs qui y a conduit, certain·es alimentent délibérément les racismes, la peur et la haine sur lesquelles ils et elles construisent leur projet politique.

À vouloir rechercher des failles dans un dispositif d’expulsion érigé en rempart contre toutes les menaces, alors qu’il fonctionne déjà en surrégime, d’autres finissent par oublier que la liberté recouvrée par l’auteur d’un viol à l’issue de sa peine n’est pas la cause de sa récidive. Brouiller ainsi la frontière entre les causes et les circonstances d’un crime, et oublier le caractère structurel des violences contre les femmes, ne font qu’alimenter ces mêmes analyses xénophobes.

La lutte contre les féminicides ne saurait relever de la rhétorique sécuritaire absurde qui prétend éradiquer le crime en stigmatisant quelques criminels. Elle n’a que faire des frontières, qui n’en protègent pas plus les victimes qu’elles n’en dissimulent les auteurs.

Un féminicide est un crime où qu’il soit commis et quel qu’en soit l’auteur. Le Gisti refusera toujours de se prêter aux raccourcis et aux amalgames sur lesquels prospère la logique délétère de l’étranger bouc émissaire.

Paris, le 9 octobre 2024

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Dernier ajout : mercredi 9 octobre 2024, 16:32
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