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Pour une couverture maladie véritablement universelle

Premiers signataires (1er février 99) : ACT UP-Paris, ARDHIS (Association pour la Reconnaissance des Droits des personnes Homosexuelles et transsexuelles à l'Immigration et au Séjour), CATRED (Collectif des Accidentés du Travail, handicapés et Retraités pour l'Égalité des Droits), CSHSP (Collectif de Soutien des Homos Sans Papiers), COMEDE (Comité Médical pour les Exilés), Droits Devant !!, Femmes de la Terre, FTCR (Fédération des Tunisiens pour la Citoyenneté des deux Rives), GISTI, MAHA (Migrants contre le Sida), OIP (Observatoire International des Prisons - Section française), SOS Racisme, URMED (Aides, Arcat-Sida, CIMADE, Comité National contre la Double Peine, Médecins Du Monde, MRAP, Sida Info Service)

Introduction

I - La législation actuelle n'est conforme ni aux engagements internationaux de la France ni aux principes fondamentaux du droit français

  1. Non conformité aux engagements internationaux
    1. L'Organisation des Nations Unies
    2. L'Organisation Internationale du Travail
    3. Le Conseil de l'Europe
    4. L'Union Européenne
    5. Les Conventions bilatérales de Sécurité Sociale : 30 pays

  2. Non conformité aux principes fondamentaux du droit français
    1. Restrictions du droit à la sécurité sociale
    2. Restrictions du droit à l'aide médicale
    3. Restrictions spécifiques du droit aux soins

II - Les effets actuels de la législation et de son application

  1. Accès insuffisant au système de soins
  2. Obstacles à l'acquisition d'une couverture maladie
    1. La complexité des textes et des procédures renforce la non-application du droit
    2. Les pratiques restrictives ou illégales de l'administration des services de protection maladie
    3. L'ignorance ou la méconnaissance des droits et des procédures par les professionnels de la santé et du social

III - Revendications

  1. Couverture maladie universelle sur critère de résidence habituelle
  2. Couverture maladie universelle
  3. Maintien des droits acquis sans condition de résidence
  4. Fin des éloignements du territoire méconnaissant l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme
  5. Respect du droit à la protection sociale des personnes retenues et détenues et de leurs ayants-droit
  6. Mise en place de dispositifs destinés à
    1. Faciliter l'accès au futur droit à une protection maladie intégrale
    2. Prévenir et résoudre les difficultés d'accès aux soins

Annexe I - Avis du Conseil d'Etat du 8 janvier 1981

Annexe II - Articles de l'ordonnance du 2 novembre 1945

Annexe III - Les conventions internationales qui lient la France :

  1. L'Organisation des Nations Unies
  2. L'Organisation Internationale du Travail
  3. Le Conseil de l'Europe
  4. L'Union Européenne
  5. Les Conventions bilatérales de Sécurité Sociale

Introduction

La Protection sociale, enjeu majeur dans la France et l'Europe d'aujourd'hui, constitue par excellence l'aire où doivent converger les valeurs républicaines de solidarité, d'égalité et de citoyenneté active pour tous et par tous, afin qu'en cette année de cinquantenaire de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, il devienne à tous possible de s'affirmer « citoyens égaux ».

La société française dans son ensemble a jusqu'à présent manifesté un attachement de principe au maintien d'une Sécurité sociale « à la française », dans la grande tradition des conquêtes sociales qui suivirent la seconde guerre mondiale.

Il apparaît cependant que les effets dévastateurs d'une mondialisation qui se fait contre l'intérêt des peuples ont gravement rompu le principe d'universalité de la sécurité sociale et favorisé l'émergence d'une protection sociale à deux vitesses, fruit des multiples formes de l'exclusion sociale.

Dans ce contexte global grave, le gouvernement a annoncé, dès le printemps 1998, dans le cadre du projet de loi relatif à la lutte contre l'exclusion, son intention de proposer au Parlement, avant la fin de 1998, un projet de loi instaurant une « couverture maladie universelle ». A cette fin, le Premier Ministre a confié à Monsieur Jean-Claude BOULARD, député, une mission de concertation et de proposition auprès de la Ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur Lionel JOSPIN, dans sa lettre du 2 juin 1998 à Monsieur Jean-Claude BOULARD, constate que « la précarité dans laquelle se trouvent nombre de nos concitoyens menace l'égalité d'accès aux soins ». En conséquence, le gouvernement a décidé de mener une réforme selon trois axes : création d'une couverture maladie universelle ; protection complémentaire ; et suppression de diverses charges du type « ticket modérateur », en réalité ticket d'exclusion, pour les plus démunis.

La réforme, en instaurant pour tous ceux qui ne relèveraient pas déjà d'un régime professionnel, une couverture universelle dans le cadre du régime général, devrait avoir pour effet de supprimer les mécanismes « complexes »de l'aide médicale et de l'assurance personnelle, tout en maintenant un « mécanisme d'action sociale »pour les personnes en situation difficile ou en situation irrégulière.

Les organisations soussignées, ayant pris connaissance du Rapport présenté le 5 août 1998 au Premier Ministre par Monsieur Jean-Claude BOULARD, tiennent à affirmer leur attachement prééminent au principe général d'universalité de la Protection sociale et d'égalité des droits dans l'accès aux soins médicaux pour tous ceux qui résident sur le territoire français. Elles prennent acte que selon le rapporteur :

« L'instauration d'une couverture maladie universelle doit permettre de passer du droit juridiquement affirmé à la santé, au droit, réellement exercé, de se soigner ».

A la lumière de leur expérience, elles tiennent à attirer l'attention du gouvernement, du législateur et de l'ensemble de la société sur les exclusions et la précarité dont sont particulièrement victimes les personnes de nationalité étrangère résidant en France.

Dans le chapitre intitulé « La couverture maladie des personnes de nationalité étrangère », Monsieur Jean-Claude BOULARD envisage que les étrangers en situation régulière soient affiliés au régime de base « sur critère de résidence »en produisant un titre de séjour « d'au moins trois mois ». Il en serait de même pour les étrangers sans titre de séjour justifiant de plus de 3 ans de présence ininterrompue en France. Quant aux personnes justifiant de durées de séjour moindres, au regard des intérêts de la personne malade et de ceux de la collectivité d'accueil, compte tenu des problèmes de santé publique, le moment ne serait-il pas venu de « mettre en oeuvre le seul critère de résidence durable pour ouvrir droit à l'affiliation au régime de base et l'accès à la couverture complémentaire ? ».

Sans doute faut-il rappeler à cet égard que le Conseil d'Etat, dans un avis du 8 janvier 1981 (concernant à l'époque les conditions d'accès à l'aide médicale hospitalière), a déjà défini - à la lumière des principes constitutionnels et des engagements internationaux de la France - le sens qu'il convient de donner au terme de « résidence »en France (cf. Annexe I). De plus, par ses engagements internationaux, la France s'est engagée systématiquement à assurer l'égalité de traitement entre nationaux et étrangers (cf. Annexe II).

Les organisations soussignées se proposent donc de rappeler les différents engagements internationaux pris par la France, de mettre en lumière que la législation en vigueur et l'application qui en est faite ne sont conformes ni aux engagements internationaux ni aux principes fondamentaux du droit français. Elles présentent en conséquence un certain nombre de revendications à l'attention du gouvernement, du législateur, des partenaires sociaux et des citoyens.

La réforme annoncée doit être l'occasion d'assurer, dans le domaine crucial de la santé, une véritable égalité des droits entre tous les résidents, seule garante à la fois du respect des droits fondamentaux et des exigences de la santé publique. Mais cette réforme appelle la plus grande vigilance de tous les acteurs concernés afin que l'instauration de mesures et de dispositifs nouveaux ait bien pour effet non de renforcer et pérenniser un système de santé à deux vitesses - filière sanitaire des pauvres, des marginaux, des immigrés et sans papiers (parmi les plus gravement frappés par la tuberculose, le SIDA ou d'autres pathologies graves) contre médecine à part entière des favorisés - mais bien d'"inclure les exclus dans la couverture de tous »(lettre de M. J.C. BOULARD au Premier Ministre, 5-08-98), y compris l'ensemble des étrangers « résidant »en France, de leurs ayants-droit et des personnes ayant acquis des droits en France.

Encore faudra-t-il que les moyens mis en oeuvre pour la couverture maladie universelle qui devrait comprendre la couverture de base et une couverture complémentaire, le permettent, à l'exclusion de tout mécanisme discriminatoire d'action sociale qui ne pourrait manquer de perpétuer des réponses de l'ordre du « caritatif ».

I - La législation actuelle n'est conforme ni aux engagements internationaux de la France ni aux principes fondamentaux du droit français

A - Non conformité aux engagements internationaux

La loi du 24 août 1993 marque un tournant capital dans la législation sur les étrangers, et notamment en matière de protection sociale, en imposant le principe d'accès à la sécurité sociale sous réserve de la régularité du séjour. Il convient donc de réaffirmer que l'introduction de cette exigence nouvelle constitue une violation non seulement des principes fondamentaux du droit français (cf. Annexe I, Avis du Conseil d'Etat), mais aussi des engagements internationaux de la France (cf. Annexe III).

Le Conseil Constitutionnel lui-même dans sa décision N° 89.269.DC du 22 janvier 1990, portant sur la loi DMOS du 23-01-1990, en sa partie relative à l'allocation supplémentaire du Fonds National de Solidarité, précise que « le législateur peut prendre à l'égard des étrangers des dispositions spécifiques à la condition de respecter les engagements internationaux souscrits par la France et les libertés et droits fondamentaux de valeur constitutionnelle reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République »

Tel n'est pas le cas en l'espèce. De surcroît, on peut estimer que les conventions internationales, en raison de leur généralité et du caractère concordant de leurs dispositions, posent un principe général et fondamental du droit international selon lequel le droit à la sécurité sociale est un droit fondamental attaché à la personne. Les États ne peuvent subordonner le droit à la sécurité sociale à l'exigence de la régularité du séjour sur leur territoire, surtout lorsqu'il s'agit de prestations contributives dues en contrepartie de cotisations. Et s'il existe bien un principe général du droit international en ce sens, on concevrait mal de ne pas interpréter notre Constitution à la lumière de ce principe.

Pourtant, à l'exception de quelques réserves d'interprétation, le Conseil Constitutionnel, saisi en 1993, n'avait pas censuré la loi du 24 août 1993, au motif que sa compétence se limite à évaluer la conformité de la loi avec la Constitution, à l'exclusion des textes internationaux pourtant signés et ratifiés dans le cadre de nombreuses organisations internationales intergouvernementales (cf. Annexe III) :

1- L'Organisation des Nations Unies

2- L'Organisation Internationale du Travail

3- Le Conseil de l'Europe

4- L'Union Européenne

  • Le Traité de Rome du 25 mars 1957 ;

  • Les Accord de coopération conclus par la Communauté avec l'Algérie, le Maroc et la Tunisie (entrés en vigueur le 1-11-1978) et l'accord d'Association conclu avec la Turquie le 12 septembre 1963 (adopté le 19-09-1980) ;

  • La Convention de Lomé du 15 décembre 1989 avec les pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) ;

5- Les Conventions bilatérales de Sécurité Sociale : 30 pays

B- Non conformité aux principes fondamentaux du droit français

Le Préambule de la Constitution de 1946 stipule : « La Nation garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle... ».

Certes, depuis la réforme de l'Aide Médicale de 1992, toute personne démunie et ses ayants-droit résidant en France a droit a une couverture maladie permettant l'accès intégral aux dispositifs de santé de droit commun. Il existe cependant de nombreuses restrictions aux droits tant à la sécurité sociale qu'à l'aide médicale.

1 - Restrictions du droit à la sécurité sociale

Les personnes en situation irrégulière, dont les ayants-droit, se voient privés de leur droit à des prestations contributives. La loi permet - et même impose - la remise en cause de droits régulièrement acquis, véritable spoliation des intéressés. La loi viole de surcroît le principe d'égalité, dans la mesure où en sont victimes les seuls étrangers qui ont pourtant cotisé dans les mêmes conditions que les nationaux.

En matière de sécurité sociale, en effet, la plupart des prestations - et tel est le cas de celles qui sont explicitement refusées depuis la loi du 24-08-1993 - sont la contrepartie des cotisations versées par les intéressés et leurs employeurs. Faire dépendre le bénéfice de ces prestations de la régularité du séjour, c'est d'abord mêler de façon bien inopportune police et protection sociale, mais c'est aussi engendrer des conséquences humaines et sociales iniques, telles que :

  1. non prise en charge par la sécurité sociale consécutive au refus de renouvellement de carte de séjournbsp;: la loi du 24-08-1993 a supprimé la possibilité pour des étrangers, privés de renouvellement de leur titre de séjour, de continuer à bénéficier du droit commun en matière d'ouverture des droits par la sécurité sociale.

  2. interruption illégale des droits pendant les périodes de renouvellement de titres de séjour ou d'identité : Les rendez-vous de préfectures ne figurent évidemment pas sur la liste des titres de séjours requis. Ce problème affecte non seulement les étrangers en renouvellement de titre de séjour mais aussi les français d'origine étrangère en renouvellement de carte d'identité. En effet, l'administration les considère suspects d'être étrangers.

  3. Principe de territorialité : sous réserve des conventions internationales
    • les ayants-droit restés au pays ne bénéficient d'aucune protection sociale,
    • les étrangers rentrés au pays à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle perdent le droit à la protection sociale en France,
    • les retraités étrangers rentrés au pays ne bénéficient que d'une protection sociale limitée en France.

2 - Restrictions du droit à l'aide médicale

  1. restriction du droit à l'aide médicale dans les D.O.M. : en matière de législation sur les étrangers, les DOM - Martinique, Guadeloupe avec le cas particulier de Saint-Martin et de la Guyane - font depuis longtemps l'objet d'une dérogation défavorable au droit commun : l'aide médicale à domicile n'est pas accessible aux étrangers en situation irrégulière ni à leurs ayants-droit ( article 186 du code de la famille et de l'aide sociale).

  2. restriction du droit à l'aide médicale à domicile pour les étrangers en situation irrégulière résidant en France métropolitaine depuis moins de trois ans.

  3. restriction du droit à l'aide médicale pour les personnes et leurs ayants-droit irréguliers ayant des ressources de peu supérieures au plafond d'admission de plein droit.

  4. restriction du droit à l'aide médicale des ayants-droit irréguliers d'assurés sociaux dont les ressources dépassent le plafond d'admission.

3 - Restrictions spécifiques du droit aux soins

  1. Restriction du droit aux soins des étrangers frappés d'éloignement du territoire :

    L'introduction de dispositions protégeant théoriquement les étrangers gravement malades résidant en France, demandée depuis plusieurs années par les associations de défense des droits des étrangers, fait suite aux arrêts de la Cour européenne des Droits de l'Homme - fondés en particulier sur l'article 3 de la convention - condamnant certains états signataires pour avoir voulu exécuter l'éloignement de personnes atteintes de pathologies graves.

    Après la loi du 24 avril 1997 qui avait introduit une protection contre les mesures administratives d'éloignement du territoire (expulsions et reconduites à la frontière) pour l'étranger gravement malade résidant habituellement en France (cf. Annexe II), la loi du 11 mai 1998 en a quelque peu modifié le libellé, élargissant théoriquement cette protection aux interdictions judiciaires du territoire et en l'assortissant d'un droit au séjour (cf. Annexe II).

    Lorsqu'aux termes de la loi, il s'agit de déterminer les conditions qui s'opposeraient à l'éloignement, il n'est pas suffisant d'établir l'existence ou non de structures de soins dans le pays de renvoi. Comme le précise la circulaire d'application de la loi du 11 mai 1998, il convient tout autant de tenir compte de la possibilité effective pour l'étranger d'y accéder. En effet, de nombreux obstacles financiers, géographiques, sociaux, juridiques ou même politiques conditionnent absolument la jouissance réelle de cette possibilité. Or, force est de constater qu'il n'existe aucun étalon internationalement reconnu permettant de déterminer la situation sanitaire réelle des pays de renvoi et de garantir absolument la non violation de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme qui ne souffre aucune restriction.

  2. Restriction du droit aux soins dans les zones d'attente et en rétention administrative :

    Les zones d'attente et la rétention administrative, éléments majeurs des politiques de contrôle des frontières et d'éloignement du territoire appliquées par les gouvernements successifs, ne bénéficient pas aujourd'hui d'un statut légal clair d'application générale qui garantisse le respect des droits fondamentaux de la personne et, en particulier, le droit d'accès aux soins pendant le temps du maintien ou de la rétention.

    En outre, la rétention est le dernier lieu où un étranger puisse faire valoir ses droits à demeurer en France. Au premier rang de ces droits figurent, pour les étrangers atteints de pathologies graves, la protection contre l'éloignement du territoire ainsi que l'accès à une procédure de régularisation. Or, il n'existe pas de garantie d'accès à des soins non plus que d'accès à du personnel médical librement choisi par la personne retenue, seule réelle garantie d'indépendance vis-à -vis de l'administration.

  3. Restrictions du droit à la santé et à la dignité dans les lieux d'enfermement :

    Les restrictions de droits propres aux lieux de privation de liberté ( prisons, zones d'attente, centres de rétention, lieux de garde à vue...) génèrent des conditions inacceptables d'indigence et de manque d'hygiène, au mépris des droits fondamentaux de la personne humaine, dont le droit à la santé et à la dignité des personnes détenues et retenues.

    Les détenus étrangers en situation irrégulière bénéficient pendant leur détention de l'assurance maladie mais cette couverture ne s'étend pas aux ayants-droit, même mineurs. De plus, ces détenus ainsi que leurs ayants-droit sont exclus du maintien des droits à la couverture sociale à la sortie de prison.

II - Les effets actuels de la législation et de son application

A - Accès insuffisant au système de soins

La multiplication des dispositifs précarité du système de santé a permis d'améliorer, dans certains secteurs géographiques, l'accès aux seuls premiers soins mais leur caractère dérogatoire est inacceptable en droit car seule la possession d'un titre de couverture maladie à 100 % garantit la continuité des soins et le choix du médecin.

Ces dispositifs ne délivrent au mieux que les premiers traitements nécessaires ou permettent l'accès gratuit à la consultation du spécialiste. La répétition ou la continuité des soins imposent d'autres dépenses : hospitalisation non urgente, thérapeutiques coûteuses, bilans réguliers et traitements quotidiens pour les affections chroniques. Pour les personnes qui ne bénéficient pas d'une dispense intégrale d'avance des frais (100 % sécurité sociale et/ou aide médicale), l'interruption des soins est la règle.

B- Obstacles à l'acquisition d'une couverture maladie

1 - La complexité des textes et des procédures renforce la non application du droit
  1. multiplicité des administrations : sécurité sociale (CPAM), aide médicale départementale (Conseil Général), aide médicale d'Etat (DASS Etat) pour les personnes sans domicile fixe, délégation de l'aide médicale départementale et/ou Etat aux CPAM ;

  2. multiplicité des procédures : les règlements d'aide sociale et les barèmes de ressources varient selon les départements. Les listes des documents exigés pour la sécurité sociale ou l'aide médicale varient selon chaque centre communal.

  3. multiplicité des statuts administratifs : des rendez-vous ou convocation préfecture aux cartes de résidents en passant par les cartes temporaires, les autorisations provisoires de séjour et les récépissés...

  4. multiplicité des guichets : selon le lieu de domicile ou l'absence de domicile fixe, le nom, le sexe, l'âge...

  5. multiplicité des supports de la couverture maladie : carte de sécurité sociale, titre et/ou notification d'admission à l'aide médicale, étiquettes et/ou bulletins de soins, carte santé...

2 - Les pratiques restrictives ou illégales de l'administration des services de protection maladie

  1. refus d'instruction des demandes, comme la demande préventive d'aide médicale en établissement de soins (AMH), ou les demandes déposées par les personnes en situation irrégulière de séjour pourtant résidentes en France et domiciliées dans la commune ;

  2. demandes abusives de documents, comme un « titre de séjour en cours de validité »ou une « attestation de ressources d'un hébergeant »non obligé alimentaire, un certificat d'hébergement « certifié conforme », ou encore pour les personnes sans domicile fixe l'exigence d'une domiciliation dans un organisme « agréé ».

3 - L'ignorance ou la méconnaissance des droits et des procédures par les professionnels de la santé et du social

Par ignorance ou méconnaissance du droit et des procédures d'accès à la protection sociale, un certain nombre de professionnels - travailleurs sociaux, personnels d'accueil des administrations concernées, agents administratifs des hôpitaux... et autres spécialistes de la précarité considèrent trop souvent les pratiques d'exclusion comme la « norme »et les dispositifs caritatifs et de solidarité comme les seules solutions d'accès aux soins.

C'est ainsi que, dans les faits, parallèlement à des droits non appliqués, la « charité »a tendance à se développer aux dépens du « droit ». On croit régler les difficultés d'accès aux droits des personnes les plus démunies et en situation de grande précarité - dont les étrangers en situation irrégulière - en s'adressant aux dispositifs caritatifs d'accès aux premiers soins, dont le nombre et la visibilité augmentent régulièrement.

Incapables d'assurer la continuité des soins, ces dispositifs servent d'alibi à l'absence de politique contre l'exclusion malgré une pratique experte des solutions personnalisées et autres bricolages des offres de soins. Ils contribuent ainsi à la pérennisation de dysfonctionnements inacceptables.

III - Revendications

Selon M. J.C. BOULARD, « les personnes pouvant justifier d'un séjour ininterrompu depuis plus de trois ans devraient se voir reconnaître le droit à l'affiliation au régime de base, sur critère de résident ». Mais, poursuit-il, « la question se pose pour les durées de séjours inférieures à trois ans. La transposition fondée sur les seuls droits ouverts par l'aide médicale conduirait à n'ouvrir que la couverture des frais d'hospitalisation. On peut s'interroger sur la pertinence du maintien de la distinction "plus ou moins trois ans de séjour ininterrompu" qui a pour effet de reporter sur les hôpitaux des prises en charge qui pourraient se faire de façon moins coûteuse au niveau de la médecine de ville. S'agissant de l'accès aux soins, qui ne renvoie pas seulement à l'intérêt de la personne mais aussi à l'intérêt de la collectivité d'accueil, compte tenu des problèmes de santé publique, il est possible de se demander si le moment n'est pas venu de mettre fin à deux distinctions :

  • accès à l'hôpital et accès à la médecine de ville,

  • résidence régulière et résidence sans titre de séjour.

Ne faut-il pas mettre en oeuvre le seul critère de résidence durable pour ouvrir le droit à l'affiliation au régime de base et l'accès à la couverture complémentaire ? »

Au regard de la question posée, les organisations soussignées présentent les revendications suivantes:

A - Couverture maladie universelle sur critère de résidence habituelle

L'affiliation au régime de base devrait se faire sur critère de résidence « durable »ou « habituelle », au sens de l'avis du 8 janvier 1981 du Conseil d'Etat (cf. annexe I) et de l'ordonnance du 2 novembre 1945 et devrait donner accès à la fois à l'hôpital et à la médecine de ville. Quant à l'allocation personnalisée santé, attribuée sous condition de ressources, elle jouerait le rôle de protection complémentaire.

Toute décision politique, qui ne retiendrait pas comme critère unique d'inclusion dans le « droit commun »la « résidence »habituelle ou durable en France, conduirait à exclure une partie de la population - résidents en situation administrative précaire et sans-papiers - et entraînerait des conséquences graves sur la santé individuelle et la santé publique. Les propositions visant notamment à limiter l'affiliation au régime de base en fonction de la possession de titres de séjour définis par décret, à limiter la prise en charge de certains étrangers résidents sans titre de séjour aux seuls « frais d'hospitalisation », à développer des dispositifs de santé gratuits et/ou spécifiques, signifieraient un recul grave dans le domaine du droit à la santé, rendant impossible la prévention sanitaire et la continuité des soins pour une partie de la population.

B - Couverture maladie universelle

Pour les ayants-droit d'un assuré, sans condition de résidence. Cette demande va précisément dans le sens d'un exigence formulée par la Fédération des Mutuelles de France selon laquelle il convient de veiller à ce que « l'ensemble de la protection maladie, obligatoire et complémentaire, soit placé en dehors de toute pratique de sélection et d'exclusion visant à empêcher toute discrimination entre les personnes... ».

C - Maintien des droits acquis sans condition de résidence

Cette exigence devrait s'appliquer notamment au cas des étrangers retournés dans leur pays d'origine soit pour motifs d'accident du travail, de maladie professionnelle ou d'invalidité, soit lors de la retraite...

D - Fin des éloignements du territoire méconnaissant l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme

Il devrait être totalement mis fin à toute forme judiciaire ou administrative d'éloignement du territoire lorsque n'existe pas la garantie écrite que l'intéressé aura un accès effectif à une prise en charge médicale dont le défaut entraînerait des conséquences physiques, psychiques et morales d'une exceptionnelle gravité, pouvant aller jusqu'à mettre en jeu la survie.

E - Respect du droit à la protection sociale des personnes retenues et détenues et de leurs ayants-droit

L' exigence de couverture véritablement universelle inclut tout particulièrement :
  • la reconnaissance véritable du droit d'accès aux soins dans les zones d'attente et les centres de rétention,

  • l'ouverture du droit à la protection sociale pour les ayants-droit mineurs et majeurs de personnes détenues en situation irrégulière,

  • le maintien, à la sortie de détention, du droit à la protection sociale pour les personnes ayant achevé une peine ainsi que pour leurs ayants-droit.

F - Mise en place de dispositifs destinés à

1- faciliter l'accès au futur droit à une protection maladie intégrale

  1. Une gestion unique et centralisée de la couverture maladie,

  2. La généralisation de « Guichets Uniques »,

  3. La délivrance exclusive d'un Titre Unique ,

  4. La généralisation de la dispense d'avance des frais (tiers payant),

  5. L'admission en urgence sur le modèle de « l'admission immédiate »à l'aide médicale.
2- prévenir et résoudre les difficultés d'accès aux soins
  1. Création des « cellules d'alerte »précarité/accès aux soins recommandées par le Haut Comité de la Santé Publique dans chaque département. Saisies par les demandeurs et les associations en cas d'exclusion de soins, elles doivent être dotées du pouvoir de lever les obstacles liés à la non application de la loi.

  2. Formation des professionnels de la santé et du social sur l'accès aux soins, notamment la couverture maladie de toute personne « résidant en France »et de ses ayants-droit.

Annexe I

Avis du Conseil d'Etat du 8 janvier 1981

« L'article 124 du Code de la Famille et de l'Aide Sociale dispose que "toute personne résidant en France, bénéficie, si elle remplit les conditions légales d'attribution, des formes de l'aide sociale telles qu'elles sont définies dans le présent code." La condition de résidence posée par cette disposition, et qui s'impose aux étrangers en l'absence de convention contraire doit être regardée comme satisfaite, en règle générale, dés lors que l'étranger se trouve en France et y demeure dans des conditions qui ne sont pas purement occasionnelles et qui présentent un minimum de stabilité. Cette situation doit être appréciée dans chaque cas, en fonction de critères de fait et, notamment, des motifs pour lesquels l'intéressé est venu dans notre pays, des intentions qu'il manifeste quant à la durée de son séjour.

En revanche, il ne peut être exigé que l'intéressé séjourne en France dans des conditions régulières et notamment soit titulaire d'une carte de séjour ou d'un titre équivalent. »

Annexe II

Articles 25 § 8° et 12 bis § 11° de l'ordonnance du 2 novembre 1945, telle que modifiée par la loi du 11 mai 1998

Article 25-8° : « Ne peuvent faire l'objet d'une expulsion, en application de l'article 23 : [...]

8° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ».

Article 12 bis - 11° : « Sauf si sa présence constitue une menace à l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : [...]

11° 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ».

Article 131 - 30 § 6° du Code Pénal tel que modifié par la loi du 11 mai 1998

« Le tribunal ne peut prononcer que par une décision spécialement motivée au regard de la gravité de l'infraction et de la situation personnelle de l'étranger condamné l'interdiction du territoire français, lorsqu'est en cause :

...

6° Un condamné étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. »

Annexe III Les conventions internationales qui lient la France

1 - L'Organisation des Nations Unies

  • La Déclaration Universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948 et le Pacte International relatif aux droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies du 16 décembre 1966 :

    La Déclaration Universelle énumère aux articles 22, 23 et 25 les droits fondamentaux en matière de sécurité sociale. Ainsi « toute personne, en tant que membre de la société, a droit à la sécurité sociale, [...] à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, [...] les soins médicaux, [...] Tous ces droits sont rattachés à la personne humaine, quelque soit sa situation sociale, économique ou professionnelle.

    Dans le Pacte International, « les états parties reconnaissent le droit de toutes les personnes à la sécurité sociale, y compris les assurance sociales (Art. 9) ».

  • La Convention de Genève du 28 juillet 1951 :

    Portant création d'un statut international des réfugiés, ratifiée par la France, entrée en vigueur le 22 septembre 1954, cette convention précise les obligations. Tous les réfugiés, bénéficiaires ou non de la Convention de Genève, et tous les apatrides qui exercent une activité rémunérée en France sont obligatoirement assujettis à la sécurité sociale dans les mêmes conditions que les français. Cette obligation d'assujettissement et de cotisation s'impose même si l'intéressé n'a aucun droit à la prestation. Egalité de droit : les réfugiés et apatrides bénéficient, ainsi que leurs ayants droit, pour les services accomplis en France, des mêmes prestations que les travailleurs français. Ils bénéficient du même principe d'égalité de traitement en ce qui concerne l'exportation des prestations au titre des assurance obligatoires ou volontaires, dans l'hypothèse où ils vont s'établir hors du territoire français.

    Pour mémoire, la protection de la Convention s'exerce à compter de la demande d'asile et non de l'obtention du statut. L'égalité de traitement doit donc être considérée comme acquises dès la demande, ce qui est loin d'être le cas actuellement.

  • La Convention sur les Droits de l' Enfant du 20 novembre 1989 :

    L'article 24 reconnaît à l'enfant le droit de jouir du meilleur état de santé possible et de bénéficier de services médicaux, les États devant s'efforcer de garantir qu'aucun enfant ne soit privé du droit d'avoir accès à ces services et devant assurer aux mères des soins prénataux et postnataux appropriés.

    L'article 26 reconnaît à tout enfant le droit de bénéficier de la sécurité sociale.

    L'article 27 reconnaît le droit de tout enfant à un niveau de vie suffisant pour permettre son développement physique, mental, spirituel, moral et social, les états devant aider les parents à mettre en oeuvre ce droit en leur offrant en cas de besoin une assistance matérielle. En privant les parents du droit à la sécurité sociale et à l'aide sociale, la loi compromet la jouissance de ces droits par les enfants.

2- L'Organisation Internationale du Travail

  • La convention N° 118 de l'O.I.T. du 28 juin 1962 :

    Elle concerne l'égalité de traitement des nationaux et des non nationaux en matière de sécurité sociale. L'article 4 pose en principe que « l'égalité de traitement doit être assurée sans condition de résidence », en définissant strictement les cas dans lesquels il peut être dérogé à ce principe, tandis que l'article 1er précise que le terme « résidence »désigne la « résidence habituelle ».

    Cette convention, a une portée obligatoire à l'égard de tous les États l'ayant ratifiée pour chaque branche concernée : elle s'applique donc à l'heure actuelle dans les rapports de la France avec la quarantaine d'états qui l'ont également ratifiée, notamment la République Centrafricaine, la Guinée, Madagascar, la Tunisie, la Turquie, le Zaïre. Il ne fait guère de doute que cette convention, parce qu'elle a une visée universelle, exprime un principe général du droit international en matière de sécurité sociale dont la portée dépasse le champ d'application dans les rapports entre les États qui l'ont ratifiée.

3- Le Conseil de l'Europe

  • La Convention Européenne d'Assistance Sociale et Médicale, entrée en vigueur le 1er juillet 1954.

    Elle lie les états membres qui l'ont ratifiée (Belgique, Danemark, France, RFA, Islande, Irlande, Italie, Luxembourg, Norvège, Royaume-Uni, Turquie, Espagne, Malte).

    Par assistance sociale et médicale, la Convention entend toute assistance prévue par les lois et règlements en vigueur sur toute ou partie du territoire d'un état membre tendant à accorder aux personnes démunies de ressources suffisantes les moyens d'existence et les soins que nécessite leur état à l'exception des pensions non contributives...

    Cette convention étend au domaine de l'assistance médicale et sociale le principe d'égalité de traitement fondé sur la réciprocité concernant la sécurité sociale. Par conséquent, chaque état contractant s'engage à appliquer de manière absolue le principe d'égalité à tout ressortissant d'un autre état contractant régulièrement ou légalement présent sur le territoire.

  • La Charte Sociale Européenne, signée à Turin le 18 octobre 1961.

    Elle a été ratifiée par la France le 9 mars 1973, ainsi que par l'Autriche, la RFA, Chypre, le Danemark, l'Espagne, l'Islande, l'Irlande, l'Italie, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et la Suède.

    Le principe d'égalité de traitement s'applique en matière de sécurité sociale et d'assistance sociale et médicale.

  • La Convention Européenne des droits de l'Homme.

    Signée à Rome le 4 novembre 1950 et ratifiée par la France le 3 mai 1974. L'article 14 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme prévoit que la jouissance des droits et libertés protégés par la convention doit être assurée « sans distinction aucune », notamment d'origine nationale.

  • La jurisprudence de la Cour relative à la Convention Européenne des Droits de l'Homme.

    Dans un arrêt du 16 septembre 1996 la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH) de Strasbourg a reconnu pour la première fois le principe d'égalité de traitement en matière de protection sociale comme principe fondamental des Droits de l'Homme (CEDH. 16.09.96 Gayguzuz / Autriche). Il s'agissait en l'espèce d'un ressortissant turc résidant régulièrement en Autriche qui se voyait refuser le bénéfice d'une allocation d'urgence. La CEDH a estimé et conclu que la seule prise en compte de la nationalité pour le versement de cette prestation ne reposait sur aucune « justification objective et raisonnable »et constituait sans aucun doute un manquement aux engagements internationaux pris par l'adhésion à la Convention Européenne des Droits de l'Homme.

    NB : une décision Conseil Constitutionnel va dans le même sens : La décision du Conseil Constitutionnel, N° 89.269, du 22 janvier 1990, parue au journal officiel du 24 janvier 1990, censurant l'article 24 de la loi DMOS du 23-01-1990 relatif à l'allocation supplémentaire du Fonds National de Solidarité, rappelle que « le législateur peut prendre à l'égard des étrangers des dispositions spécifiques à la condition de respecter les engagements internationaux souscrits par la France et les libertés et droits fondamentaux de valeur constitutionnelle reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République ».
    Or, les caisses de sécurité sociale donnent des instructions contraires.

4- L'Union Européenne

  • Le Traité du 25 mars 1957.

    S'agissant des ressortissants des états membres de la communauté européenne et des membres de leur famille quelle que soit leur nationalité, la condition de résidence régulière est contraire au Traité de Rome et aux règlements relatifs à l'application des régimes de sécurité sociale (règlement 1408/71 du 14 juin 1971. Art. 3) et à la libre circulation des travailleurs au sein de la communauté (règlement 1612/68 du 15 octobre 1968. Art. 7-2) puisqu'est proscrite toute discrimination par rapport aux nationaux. On sait par ailleurs que la détention d'un titre de séjour n'est pas, pour les ressortissants des états membres, une condition de la régularité de leur séjour et qu'à ce titre il n'a qu'une simple valeur déclarative. On ne saurait dès lors, dans leur cas, subordonner l'affiliation à la sécurité sociale ou le versement de prestations à la production d'un titre de séjour.

  • Les Accords de coopération conclus par la Communauté avec l'Algérie, le Maroc, la Tunisie (entrés en vigueur le 1-11-1978) et l'accord d'Association conclu avec la Turquie le 12 septembre 1963 (adopté le-19-09-1980).

    La Cour de Luxembourg a reconnu qu'ils étaient d'applicabilité directe dans un arrêt du 31 janvier 1991 (office national de l'emploi c/ Kziber 18/90). Ces accords posant le principe d'égalité entre les travailleurs des états membres et ceux de ces pays en matière de sécurité sociale, les bénéficiaires de ces conventions sont assimilés en matière de protection sociale à des ressortissants des états membres. Ce principe qui exclut donc toute discrimination fondée sur la nationalité par rapport aux ressortissants des états membres, et par voie de conséquence par rapport aux nationaux, dans le domaine de la sécurité sociale, a été confirmé par la Chambre Sociale de la Cour de Cassation qui en fait application dans un arrêt du 7 mai 1991, Mazari c/ CPAM de Grenoble. Dans la mesure où les ressortissants de la Communauté ne peuvent se voir opposer l'absence de titre de séjour, il en résulte que l'exigence de régularité du séjour ne peut pas non plus être imposée aux ressortissants de ces quatre états.

  • La Convention de Lomé du 15 décembre 1989.

    Ratifiée par 71 pays A.C.P. (Afrique, Caraïbes, Pacifique), cette convention possède des dispositions similaires.

  • La Cour de Justice des Communautés Européennes.

    Un arrêt de la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) de Luxembourg dans l'affaire Gayguzuz affirme le principe de non discrimination par rapport aux nationaux.

5 - Les Conventions bilatérales de Sécurité Sociale

La France a conclu des conventions avec une trentaine de pays. Ces conventions abandonnent le principe de territorialité des prestations au profit de l'égalité du traitement. Il en découle la conservation des droits acquis et en cours d'acquisition qui se concrétise par l'exportation des prestations sociales. La plupart de ces conventions bilatérales ont été négociées avant la loi du 24 août 1993 et ne prévoient aucune condition de régularité de séjour en matière d'affiliation et de bénéfice des prestations pour l'assuré lui-même ainsi que pour ses ayants-droit.

On peut se procurer le texte de ces conventions auprès du JO (27 rue Desaix, 75727 Paris Cedex 15), ainsi qu'au Centre de Sécurité Sociale des Travailleurs Etrangers (11 rue de la Tour des Dames 75436 Paris Cedex 9 — tel 01 45 26 33 41).

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Dernière mise à jour : 27-08-2004 15:46 .
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