[Logo]
[Bienvenue] [Le Gisti ?] [Adresses] [Bienvenue] [Plan du site] [Recherche] [Aide]
[Idées] [Formations] [Pratique] [Le droit] [Publications]
     

DOCUMENTS DE RÉFÉRENCE

La fondation Copernic propose
de repenser la politique
de l'immigration

Le Monde du 17 septembre 2001

La fondation Copernic, qui regroupe des intellectuels, des universitaires et des politiques de gauche et d'extrême gauche, a rendu publique, lundi 17 septembre, sa septième « note », intitulée Égalité sans frontière, les immigrés ne sont pas une marchandise. L'ouvrage, diffusé par les éditions Syllepse, analyse l'échec de la politique de fermeture des frontières, décortique les présupposés qui la sous-tendent et tente de « refonder » une politique des migrations.

Après avoir étudié des sujets comme les retraites, la fiscalité ou l'emploi, les « contre-experts » de la fondation se sont penchés sur une question délaissée par la gauche depuis des années. Un travail ambitieux qui a réuni, durant deux ans, responsables associatifs, élus, hauts fonctionnaires, chercheurs et universitaires.

Premier constat, et véritable leitmotiv de cette note, la politique de fermeture des frontières serait une chimère après laquelle courent tous les gouvernements. Instaurée en 1974 après le premier choc pétrolier, cette politique, appelée plus récemment maîtrise des flux migratoires, est devenue, selon les auteurs, une « illusion » : elle réduit les flux dans les statistiques officielles qui recensent les arrivées des seuls étrangers autorisés à s'installer, mais occultent tous les autres entrés clandestinement. Elle serait ainsi devenue « une fabrique à sans-papiers », relève le document. Selon certaines estimations, près de trois cent mille étrangers vivraient en situation irrégulière sur le territoire français.

Née d'une première illusion — le pouvoir de fermeture des frontières des pays du Nord —, la politique de maîtrise des flux migratoires en a entraîné une deuxième : la conviction que les migrations s'expliquaient par la seule pauvreté et qu'il suffisait alors de l'atténuer dans les pays d'origine pour freiner les envies de partir. Les auteurs rappellent fort à propos que l'histoire des peuples, les liens culturels tissés entre pays, la proximité linguistique ou l'existence de régimes antidémocratiques sont des facteurs « beaucoup plus importants dans la dynamique migratoire que la seule loi du "différentiel de revenus" ». « Si la pauvreté était la seule cause de départ, on ne comprendrait pas pourquoi les trois-quarts des Africains en France viennent de la seule vallée du fleuve Sénégal, qui n'est pas la région la plus pauvre d'Afrique », soulignent les experts. Autrement dit : à misère égale, certains peuples émigrent, d'autres non.

Les auteurs de la note se sont également astreints à démonter l'idée d'un lien direct entre les flux nets d'immigration et le volume de chômage dans le pays d'accueil. Le document souligne qu'en dépit d'une idée répandue, l'immigration ne serait pas un facteur d'aggravation du chômage en période de récession. Touchée de plein fouet par le chômage, la main-d'œuvre étrangère a au contraire joué un « rôle d'amortisseur de la crise pour l'ensemble du marché du travail », estiment les auteurs. Les licenciements d'étrangers ont ainsi représenté, dans les années 1980, près de la moitié des emplois supprimés dans les secteurs de l'automobile ou le BTP.

Pour les « coperniciens », la politique de fermeture participe d'une conception utilitariste de l'immigration. Les récentes tentatives du patronat d'ouvrir un débat sur l'immigration de travail en réclamant une plus grande souplesse dans les autorisations de recrutement à l'étranger en sont la dernière illustration. L'étranger désireux de séjourner en France voit son admission sur le territoire conditionnée par sa seule valeur économique ou son utilité sociale : c'est le cas des informaticiens depuis 1999, ce le sera peut-être pour les infirmières demain. Pour les non qualifiés, reste le travail clandestin. L'offre permanente et considérable de travail illégal permet à des secteurs entiers de l'économie (bâtiment, hôtellerie, confection, etc.) de perpétuer leur rentabilité en plaçant les sans-papiers dans des conditions de travail très semblables à celles des ouvriers du tiers-monde. Une sorte de « délocalisation sur place », comme la nomment les auteurs de la note.

Principe de « libre circulation »

Le débat sur l'immigration est resté jusqu'à aujourd'hui dans l'épure de la politique de contrôle des flux. Pourtant, l'extraordinaire croissance des mouvements migratoires dans le monde a rendu illusoire toute politique de fermeture des frontières : le nombre de migrants est estimé aujourd'hui à cent vingt millions alors qu'il n'était que de quarante-cinq millions en 1965. Et ce mouvement va aller en s'accentuant, selon les auteurs, car, « contrairement aux idées reçues, la modernisation des pays du Sud entraîne une intensification des migrations vers le Nord plutôt qu'un ralentissement ».

Pour la fondation Copernic, il est donc temps de sortir de cette logique. Prenant acte de l'échec des politiques conduites, les auteurs préconisent d'instituer le principe de « libre circulation et de libre installation », seule approche humaine possible. Et dont la viabilité économique ne serait pas si incertaine : consommateurs ici, donc participant à la croissance économique comme démographique des pays du Nord, les immigrés contribuent largement au développement de leur pays d'origine par leurs mandats réguliers.

Sylvia Zappi


Voir aussi :

En haut

Dernière mise à jour : 24-09-2001 19:55.
Cette page : https://www.gisti.org/ doc/presse/2001/zappi/copernic.html


Bienvenue  | Le Gisti ?  | Adresses  | Idées  | Formations  | Pratique  | Le droit  | Publications
Page d'accueil  | Recherche  | Plan du site  | Aider le Gisti  | Autres sites

Comment contacter le Gisti