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 Lutte 
  contre les discriminations dans l'accès aux emplois
 Lettre ouverte au premier ministre
Paris, le 9 avril 2001 Monsieur le Premier ministreHôtel Matignon
 Objet : Accès des étrangers aux emplois et droits 
          soumis à condition de nationalité. Monsieur le Premier Ministre, À plusieurs reprises, votre gouvernement a affirmé sa 
          volonté de combattre les discriminations frappant les ressortissants 
          étrangers résidant en France. Dans ce cadre, une proposition 
          de loi visant à éliminer les discriminations au travail 
          a été déposée à l'Assemblée 
          Nationale le 13 septembre 2000. Cette initiative parlementaire 
          en direction du secteur privé, aussi louable soit-elle, devrait 
          être l'occasion de mettre un terme aux discriminations prévues 
          par les textes en vigueur. Il subsiste en effet dans notre droit un ensemble de textes  parfois 
          très anciens  de valeur législative ou réglementaire 
          refusant aux étrangers le bénéfice de certains 
          droits ou leur interdisant l'accès à certains emplois 
          ou fonctions.  Votre gouvernement a déjà posé les premiers jalons 
          de la lutte contre ces discriminations. Lors d'une communication en 
          conseil des ministres le 21 octobre 1998, Madame la ministre de 
          l'emploi et de la solidarité annonçait qu'il « sera 
          procédé à une analyse exhaustive des différentes 
          professions dont l'exercice est interdit, en droit, aux étrangers. (...) 
          À l'issue de cette analyse, le gouvernement envisagera la suppression 
          des discriminations qui n'ont plus aucune signification ». 
          Suite à cette communication, un rapport a été commandé [1]. 
          Il n'a fait que confirmer les conclusions des autres études sur 
          ce sujet [2] : la nécessité de supprimer 
          ces discriminations. Dans le cadre d'une volonté globale et cohérente de lutte 
          contre les discriminations, vous êtes conscient du rôle 
          d'exemplarité qui échoit à l'État. Les discriminations 
          légales, vous ne pouvez l'ignorer, forment le socle des discriminations 
          illégales. L'abolition des premières favorise la disparition 
          des secondes. La suppression des discriminations à l'égard 
          des ressortissants des pays membres de l'Union européenne, tant 
          dans l'accès à la fonction publique que dans l'accès 
          aux professions réglementées, en a fait la démonstration 
          et a amené les employeurs à modifier leurs pratiques de 
          recrutement. Cette évolution favorable aux ressortissants communautaires 
          n'affecte pas le fonctionnement de l'État et démontre 
          que le maintien de la condition de nationalité n'est pas inéluctable. De surcroît, cette condition de nationalité doit disparaître 
          car elle viole manifestement le principe d'égalité garanti 
          par les textes constitutionnels et les engagements internationaux souscrits 
          par la France. Dans un premier temps, il vous appartient dans le cadre de l'exercice 
          de votre pouvoir réglementaire de permettre aux étrangers 
          non communautaires d'accéder aux emplois dans les entreprises 
          publiques ainsi que dans les secteurs parapublic et privé. Il 
          est de votre compétence et de votre responsabilité d'abroger 
          les textes litigieux. Mais la lutte contre les discriminations doit également s'appliquer 
          aux emplois de la fonction publique non régalienne. Près 
          de cinq millions d'emplois sont concernés. L'impératif 
          de non-discrimination commande l'ouverture à tous les étrangers 
          de cette partie du secteur public où la souveraineté de 
          la France n'est pas en jeu comme l'atteste la présence de ressortissants 
          des pays de l'Espace Economique Européen (Union Européenne 
          et Norvège, Islande, Liechtenstein). Du reste, les étrangers 
          non ressortissants de l'Espace Economique Européen participent 
          déjà au fonctionnement du service public, sous couvert 
          de statuts spéciaux, précaires, dévalorisés, 
          en un mot discriminatoires. L'accès aux emplois dans les administrations 
          françaises est ainsi reconnu aux étrangers tandis que 
          l'accès au statut de fonctionnaire leur est interdit. Il vous 
          incombe de faire cesser cette discrimination. C'est pourquoi, nous avons l'honneur de vous demander Vous remerciant de l'attention que vous pourrez porter à notre 
          demande, nous vous prions de bien vouloir recevoir, Monsieur le Premier 
          Ministre, nos salutations respectueuses. P.J. : demande d'abrogation des textes 
          soumettant l'accès à certains emplois et droits à 
          une condition de nationalité française, de l'Union européenne 
          ou de l'Espace économique européen.  Liste des signataires 
 
 
         Notes[1] Bernard Bruhnes Consultants, 
          « Les emplois du secteur 
privé fermés aux étrangers », 
          Rapport pour la Direction des Populations et des Migrations, Ministère 
          de l'Emploi et de la Solidarité, novembre 1999  [2] Notamment, dès 
          1991, Conseil National des Populations Immigrées, Égalité des droits, 
          1991 ; CERC-Association, « Immigration, emploi 
et chômage. Un état des lieux empirique et théorique », 
          Les dossiers du CERC-Association, n°3, mars 1999 ; Jean-Michel 
          Belorgey, « Lutter 
contre les discriminations », rapport à 
          Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, mars 1999 ; 
          note du Groupe d'étude sur les discriminations, « Une forme méconnue 
de discrimination et les emplois fermés aux étrangers : secteur 
privé, entreprises publiques, fonctions publiques », 
          mars 2000.  
 
           
            Dernière mise à jour : 
             21-07-2001  12:49.  Cette page : https://www.gisti.org/
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