[Logo]
[Bienvenue] [Le Gisti ?] [Adresses] [Bienvenue] [Plan du site] [Recherche] [Aide]
[Idées] [Formations] [Pratique] [Le droit] [Publications]
     

L'ordonnance du 2 novembre 1945, version Chevènement

Note sur la situation
des ressortissants algériens
et tunisiens au regard
du projet de loi Chevènement

I - Supériorité des accords bilatéraux sur l'ordonnance du 2 novembre 1945

L'ordonnance du 2 novembre 1945, régissant l'entrée et le séjour des étrangers en France, est applicable aux étrangers « sous réserve des conventions internationales ou de lois et réglements spéciaux y apportant dérogation » (Ord. 2/11/45, art. 2). La France a passé des accords bilatéraux, en matière de circulation et de séjour, avec de nombreux pays. Dans beaucoup de cas (la plupart des pays de l'ancienne AOF, le Maroc...), ces conventions ne font que renvoyer aux dispositions du régime général, c'est à dire aux conditions d'entrée, de séjour, de regroupement familial définies par l'ordonnance de 1945. Dans quelques cas, les conventions bilatérales prévoient des modalités d'accès au territoire français et des conditions de délivrance de titres de séjour qui diffèrent de l'ordonnance de 1945. C'est le cas des accords franco-algériens et des accords franco-tunisiens. Ces accords bilatéraux, comme tous les traités internationaux, ont une valeur supérieure à celle des lois et réglements (art. 55 de la Constitution). Ceci implique que sauf précision contraire, les dispositions de l'ordonnance de 1945 se rapportant à des domaines couverts par les accords sont écartées pour les ressortissants algériens et tunisiens.

II - Répartition des domaines couverts par l'ordonnance de 45 et les accords bilatéraux

  • Ainsi, parce que les accords bilatéraux n'en traitent pas, sont donc applicables aux Algériens et aux Tunisiens les dispositions du régime général concernant :

    • les mesures d'éloignement (arrêtés de reconduites à la frontière, arrêtés d'expulsion, modalités d'exécution des mesures d'éloignement) ;

    • les infractions spécifiques liées à la législation sur les étrangers (condamnations pénales y compris interdiction du territoire) ;

    • les mesures de protection prévues pour certaines catégories d'étrangers ;

    Pour les Tunisiens, il faut ajouter à cette liste les règles fixées par l'ordonnance de 1945, depuis la loi Pasqua de 1993, en matière de regroupement familial.

  • Sont en revanche écartées, pour ces deux nationalités, les dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relatives aux conditions d'attribution d'un titre de séjour. Dans l'état actuel de la législation, ces conditions sont prévues aux articles 12 bis (cartes temporaires), 15 (cartes de résident), 15 bis (refus ou retrait de la carte de résident aux étrangers vivant en état de polygamie) et 16 (renouvellement de la carte de résident).

Quelques exemples illustrent ces différences de régime : les parents algériens d'enfants français ne peuvent prétendre de plein droit au séjour en France, lorsque l'ordonnance de 1945 vise expressément cette catégorie d'étrangers. Pour toute délivrance d'un titre de séjour (temporaire ou de dix ans), les Algériens doivent justifier être entrés en France sous couvert d'un visa long séjour, alors que l'ordonnance de 1945 ne l'exige pas. En revanche, les conjoints Algériens de Français ne sont soumis à aucun délai d'attente pour bénéficier d'un certificat de résidence, quand l'ordonnance de 1945 en subordonne la délivrance à un délai d'un an (deux ans dans le projet Chevènement). Les Tunisiens, pour leur part, n'ont pas à justifier d'une entrée régulière (exigence inscrite dans l'ordonnance de 1945 - supprimée dans le projet) pour recevoir une carte de résident.

III - Implications du projet de loi « Chevènement » sur la situation des Algériens et Tunisiens

Le projet de loi modifiant l'ordonnance de 1945, dit projet « Chevènement », qui doit être soumis au parlement avant la fin de l'année 1997, prévoit - entre autres - de nouveaux cas d'attribution de titres de séjour.

  • à l'article 12 bis, serait ajoutée une catégorie d'étrangers bénéficiaires d'une carte de séjour temporaire de plein droit (mention « vie privée et familiale ») :

    • ceux pour qui un refus de séjour « porterait une atteinte disproportionnée au respect de leur situation personnelle et familiale ».

  • au nouvel article 12 ter (créé par le projet), seraient instaurés deux nouveaux cas d'attribution de plein droit d'une carte de séjour temporaire (mention « vie privée et familiale ») :

    • les étrangers « dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner [ ] des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'[ils ne puissent] bénéficier d'un traitement approprié dans leur pays d'origine » ;

    • les étrangers pouvant bénéficier de l'asile territorial (v. infra).

  • au nouvel art. 18 bis (créé par le projet), est prévue l'attribution de plein droit d'une carte de dix ans mention « retraité  » :

    • aux étrangers « ayant résidé en France , recevant une pension de retraite liquidée au titre d'un régime de base de sécurité sociale, ainsi qu'à leurs conjoints (...) ».

En application des principes rappelés plus haut, on peut penser que ces nouveaux cas d'attribution de plein droit de titres de séjour ne concerneraient ni les Algériens ni les Tunisiens, dans la mesure où ils sont prévus dans des articles de l'ordonnance qui ne s'appliquent pas à eux. Ceci n'empêche pas que les situations évoquées (notamment les malades, ou les personnes pouvant se prévaloir d'une vie personnelle et familiale en France) pourraient être prises en compte et donner lieu, comme c'est déjà le cas pour certains parents Algériens d'enfants français, à délivrance de titres de séjour. Mais celle-ci dépendrait du bon vouloir de l'administration, les intéressés n'ayant pas un droit à l'obtention d'un tel titre.

En ce qui concerne la carte délivrée au titre de l'asile territorial, la situation est différente. D'une part car on voit mal comment on pourrait prétendre exclure les Algériens du bénéfice de ce titre, alors que les discours officiels montrent qu'il a été conçu, dans une large mesure, à leur intention. D'autre part, parce que la notion d'asile territorial serait, dans le cadre de la réforme Chevènement, introduite dans la législation française par un nouvel article ajouté à la loi du 25 juillet 1952 sur l'asile. Cette loi ayant une portée générale, les ressortissants algériens et tunisiens ne sauraient être exclus de son champ d'application.

Pour une analyse de toutes les dispositions du projet Chevènement, v. la brochure du Gisti L'ordonnance du 2 novembre 1945 version Chevènement, septembre 1997.

GISTI, septembre 1997

En haut

Dernière mise à jour : 27-08-2000 17:18.
Cette page : https://www.gisti.org/ doc/publications/1997/chevenement/algeriens.html


Bienvenue  | Le Gisti ?  | Adresses  | Idées  | Formations  | Pratique  | Le droit  | Publications
Page d'accueil  | Recherche  | Plan du site  | Aider le Gisti  | Autres sites

Comment contacter le Gisti