La carte de séjour spécifique aux victimes de traite et de proxénétisme : procédure


1. La police doit informer les personnes susceptibles d’être concernées

-* CE, 15 juin 2012, n° 339209 « Mme A avait indiqué à la police, lors de son interpellation, que sa tante, qui lui avait proposé de venir en France pour visiter le pays, l’aurait en réalité contrainte à travailler à son domicile sans être déclarée ; [...] malgré ces indications, qui constituaient des motifs raisonnables de considérer que Mme A pouvait être victime de faits de traite d’êtres humains, les services de police ne lui ont pas délivré l’information prévue par l’article R. 316-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;
[...] il en résulte que Mme A était fondée, à la date de la décision contestée, à se prévaloir du délai de réflexion prévu par l’article R. 316-2 du même code, sans qu’importe la circonstance que son dépôt de plainte ait été réalisé postérieurement ;
[...] sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que Mme A est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l’annulation de l’arrêté du préfet de police du 30 janvier 2008 décidant de sa reconduite à la frontière.
 »


2. Une plainte civile ne suffit pas

  • CAA de Lyon, 7 juillet 2010, n° 09LY01977
    « Mlle A a saisi le Conseil des Prud’hommes de la violation, par sa famille d’accueil, des termes du contrat de placement de jeune fille au pair la concernant, il ne ressort pas des pièces du dossier qu’elle ait déposé plainte contre des membres de cette famille en les accusant d’avoir commis à son encontre des actes constitutifs de la traite des êtres humains ou de proxénétisme ; [...] par suite, elle ne saurait utilement se prévaloir des dispositions de l’article R. 316-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ; »

3. La procédure judiciaire engagée doit l’être pour une infraction qualifiée de "traite des êtres humains" ou de "proxénétisme"

  • Traite OU proxénétisme : la procédure s’applique à une victime de traite en vue d’une exploitation autre que le proxénétisme.
    CAA Paris, 4 mars 2010, n° 08PA02590
  • Personne ne semblant pas être victime de proxénétisme
    CAA de Nancy, 20 mai 2010, n° 09NC01803
    « Melle A, qui a été interpellée à Nancy le 30 avril 2009 pour cause de racolage sur la voie publique, a déclaré lors de son audition du même jour qu’elle ne donnait à personne l’argent gagné en se prostituant ; qu’ainsi le service de la police judiciaire ne disposait d’aucun élément de nature à lui permettre de conclure que l’intéressée puisse être victime de l’une des infractions constitutives de la traite des êtres humains ou de proxénétisme prévues par les dispositions susvisées du code pénal ; que la seule circonstance que Melle A se livrait au racolage n’impliquait pas, par elle-même, que le service de police fasse application des dispositions [prévues par les articles 316-* et R-316-* du Ceseda] ».
  • Victime dont le "passeur" a été incriminé pour "aide à l’entrée et au séjour irrégulier"
    CAA de Nantes, 14 novembre 2010, n° 08NT01295
    « M. X fait valoir que la plainte qu’il a déposée à l’encontre de son passeur le 31 janvier 2007 du chef de traite des êtres humains lui ouvre droit à la délivrance d’un titre de séjour en application des dispositions précitées de l’article L. 316-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il ressort des pièces du dossier que ledit passeur n’a été mis en examen et renvoyé devant le Tribunal correctionnel d’Orléans que du seul chef d’aide à l’entrée et au séjour irrégulier, infraction qui n’est pas au nombre de celles visées par les articles du code pénal mentionnés à l’article L. 316-1 précité ; que, par suite, et quelle que soit l’issue de la procédure pénale ainsi engagée, M. X n’est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé par le préfet du Loiret a méconnu les dispositions de l’article L. 316-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ; »
  • TA Paris, juge des référés, 15 octobre 2009, n°0915937/9

4. Citoyens et citoyennes de l’Union européenne

Le dispositif ne s’applique pas.

Si, pour cette personne, il est plus favorable que le droit communautaire, le préfet peut l’appliquer (directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres, art. 37).
Mais cette délivrance n’est pas de droit (CE, 22 juin 2012, n° 34745).


5. Algériens et Algériennes

Ce dispositif ne s’applique pas

  • CAA Marseille, 11 juin 2009, n° 07MA04515
  • CAA Paris, 7° chambre, 16 avril 2010, n°09PA01268

Mais le préfet peut en décider autrement.

  • Avis du Conseil d’État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 16 avril 2010, n° 333679
    « Toutefois, si l’accord franco-algérien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d’admission exceptionnelle au séjour, il y a lieu d’observer que ses stipulations n’interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l’ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d’apprécier, compte tenu de l’ensemble des éléments de la situation personnelle de l’intéressé, l’opportunité d’une mesure de régularisation ».
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Dernier ajout : dimanche 16 septembre 2012, 16:35
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