CFDA - Coordination française pour le droit d’asile
Retour de M. Besson à Calais
Attentes et craintes de la CFDA
A la veille de la visite de Monsieur Besson à Calais le 23 avril, la Coordination française pour le droit d’asile (CFDA) s’inquiète des récentes opérations de police dans la région et rappelle au ministre la nécessité de protéger les exilés.
Les attentes de la CFDA sont d’autant plus grandes que, lors de sa précédente visite le 27 janvier dernier, le Ministre a annoncé son retour avec des « mesures concrètes » et qu’elle a présenté les recommandations de son rapport, La loi des « jungles » - La situation des exilés sur le littoral de la Manche et de la Mer du Nord, à ses conseillers le 4 avril [1].
Pour la CFDA, le respect de la dignité de toute personne visée par ces recommandations se traduit au quotidien par un ensemble de droits, civils et politiques, économiques et sociaux. Le statut administratif ne peut et ne doit pas constituer un prétexte pour ne pas respecter le droit des personnes ou ne pas les protéger. Les lieux où les étrangers en situation d’errance sont amenés à vivre ne doivent en aucun cas être régis par des normes d’exception et l’absence de droits.
La CFDA a insisté auprès du ministère pour que les exilés, même démunis de document d’identité ou de titre de séjour ne fassent plus l’objet d’interpellations répétitives ; les violences physiques ou mesures de harcèlement (menottages inutiles, coups, utilisation de gaz lacrymogène, dégradations de leurs biens, perturbations systématiques de leur sommeil, etc.) doivent cesser. En amont, il est du devoir des parquets de contrôler le comportement des forces de police. En aval, dès lors qu’existent des indices de dérives ou d’abus, il est de la mission de la hiérarchie policière et des préfets de s’assurer que des enquêtes administratives soient menées et de celle de la justice de déclencher des enquêtes pénales.
En introduction de son rapport, la CFDA faisait part de son espoir que ce dernier suscite « une prise de conscience de la part des responsables politiques et des pouvoirs publics », tout en craignant que la mise en évidence de la situation n’entraîne « une recrudescence des interpellations d’exilés ou de destructions de campements ».
Les récentes opérations de police à Calais laissent penser que ces craintes se sont réalisées. Dans son rapport de 2008, la CFDA établit qu’un grand nombre des exilés présents à Calais pourraient, au vu de leur nationalité, obtenir le statut de réfugié en France. Beaucoup cherchent cependant une protection dans d’autres pays, notamment la Grande-Bretagne, pour divers motifs (souhait d’y rejoindre leur famille ou leur communauté, connaissance de la langue…). Néanmoins, s’ils étaient bien informés sur la procédure d’asile, correctement accueillis et rassurés sur certains aspects que la CFDA a rappelés au ministère, un plus grand nombre demanderait l’asile en France.
La CFDA a ainsi insisté pour que ses recommandations sur l’asile ne soient pas reprises isolément :
- les exilés doivent disposer d’une information complète et objective sur la procédure d’asile (comme c’est déjà le cas pour l’aide au retour) et sur leurs droits en France ou dans d’autres pays européens, dans les langues qu’ils comprennent. L’accès à cette information doit être facilité, dans les préfectures, les commissariats ou leur lieux de vie ainsi qu’auprès des associations (présence d’agents expérimentés, diffusions de documents dans les lieux fréquentés par les exilés).
- les personnes qui envisagent de déposer une demande d’asile en France doivent pouvoir le faire à Calais plutôt qu’à 100 km, à Arras ou à Lille ; les lieux d’enregistrement doivent être ainsi rapprochés des lieux fréquentés par les exilés et les personnels administratifs concernés (police, agents de préfecture) doivent avoir une formation spécifique en matière de droit d’asile.
- les exilés qui souhaitent déposer une demande d’asile en France doivent être protégés contre un renvoi vers un autre Etat membre (beaucoup sont en effet « victimes » du règlement Dublin) et être assurés que leur demande sera examinée par les autorités françaises ; notamment si un transfert vers un autre Etat membre équivaut à un examen moins attentif de leur dossier (taux de reconnaissance proche de zéro en Grèce ou à Malte).
- les personnes qui souhaitent déposer une demande d’asile en France doivent être assurées que leur demande ne sera pas examinée selon la procédure « prioritaire » leur interdisant toute assistance, l’accès à un hébergement en Centre d’accueil pour demandeurs d’asile (CADA) et un recours suspensif en cas de rejet de leur demande.
Compléments d’information
La concentration des étrangers le long du littoral nord-ouest de la France n’est pas un hasard, elle tient à une double spécificité. D’une part, la plupart des exilés présents cherchent à rejoindre une famille ou à trouver enfin une terre hospitalière. D’autre part, la Grande-Bretagne insulaire joue avec les règles de l’Union pour faire de ce fossé une double barrière administrative et policière en refusant d’appartenir à l’« espace Schengen » de libre circulation intra-européenne et en conservant la barrière du règlement Dublin qui permet de renvoyer les demandeurs d’asile, vers l’Etat membre par lequel ils sont rentrés dans l’Union. Le règlement « Dublin » repose en effet sur le principe que tout demandeur d’asile dans l’Union européenne ait sa demande examinée par un seul Etat membre. Du fait des critères établis pour désigner l’Etat responsable de cet examen, beaucoup de demandeurs en deviennent les « victimes » : l’absence de prise en considération de leurs souhaits, de la présence de leur famille, ou de leurs perspectives d’installation dans le pays de leur choix, ainsi que l’ignorance totale des considérables différences de traitement des demandes entre Etat membre, les font hésiter à demander l’asile en France de peur d’être renvoyés dans un pays où leurs empreintes ont été relevées (règlement Eurodac). |
[1] Voir site de la CFDA
Vous pouvez retrouver ce communiqué sur le site
coordination-asile-cfda.fr
Voir notre dossier « Contrôles d’identité et interpellations »
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