Jurisprudence - Le système Dublin 2 - ARCHIVE
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couverture

Cette page de jurisprudence est étroitement liée au cahier juridique du Gisti paru en décembre 2010 « La demande d’asile à l’épreuve de "Dublin II" ».

On y trouvera une analyse et des éclairages essentiels pour faire usage de la jurisprudence suivante.

Voir la présentation et le sommaire du cahier juridique

I. Procédure

Obligation de motivation et d’informations

Fondements juridiques

  • Règlement « Dublin 2 »
    Art. 3 4° 4. Le demandeur d’asile est informé par écrit, dans une langue dont on peut raisonnablement supposer qu’il la comprend, au sujet de l’application du présent règlement, des délais qu’il prévoit et de ses effets.
    Art. 19 2° et 20 1° e) (décision de remise) 2. La décision est motivée. Elle est assortie des indications de délai relatives à la mise en œuvre du transfert et comporte, si nécessaire, les informations relatives au lieu et à la date auxquels le demandeur doit se présenter s’il se rend par ses propres moyens dans l’État membre responsable.
  • Ceseda art. L. 531-1 al. 2)

Garantie essentielle donnée au demandeur d’asile

-* CAA, Nantes, 2 octobre 2009, n° 08NT02355
Une décision de reprise en charge par les autorités polonaises d’un couple russe d’origine tchétchène avait été confirmée par le TA de Rennes. Annulation car elle ne comportait aucune indication du délai des reprises en charge, information qui « constitue non une simple mesure d’exécution mais une garantie essentielle donnée au demandeur d’asile afin de lui permettre de faire valoir ses droits ».

Atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale du droit d’asile

  • CE, 30 juillet 2008, n° 313767
    Injonction au préfet à réexaminer le demande d’admission en France au titre de l’asile et suspension d’une procédure de réadmission en Pologne. Annulation de l’ordonnance de rejet d’un référé liberté.
  • CE, 17 mars 2010, n° 332586
    Décision identique à la précédente.

Convocation "piège" et placement en rétention

-* CA, Toulouse, 20 août 2010, n° 10-233
Une ressortissante de la Russie s’était rendu à la préfecture de la Gironde en déférant à une convocation qui pouvait légitimement lui faire croire qu’il s’agissait de l’examen de sa demande d’asile et de son admission au séjour. Elle avait été placée en rétention pour remise à la Pologne. La Cour d’appel ordonne sa mise en liberté.

L’’intéressé doit avoir été mis en mesure de faire ses observations

  • CE, 6 mars 2008, n° 313915
    "Il ressort des pièces du dossier qu’il lui a été indiqué, en langue russe, par des documents qui lui ont été remis à cet effet ou par le truchement d’un interprète, la nature de ces garanties, qu’il lui a été laissé le temps nécessaire pour présenter ces observations et qu’il a pu faire prévenir un parent résidant en France et son conseil ; qu’ainsi, la procédure de réadmission n’est entachée d’aucune irrégularité sur ce point".
Délais d’exécution de la remise

Fondements juridiques

  • Règlement « Dublin 2 », art. 19 3° et 4) et art. 202°. Au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l’acceptation de la demande de prise ou de reprise en charge ou de la décision sur le recours ou la révision en cas d’effet suspensif. Ce délai peut être porté à un an au maximum s’il n’a pas pu être procédé au transfert en raison d’un emprisonnement du demandeur d’asile ou à dix-huit mois au maximum si le demandeur d’asile prend la fuite.
  • Ceseda L. 531-1

L’intéressé doit avoir été mis en mesure de faire ses observations

  • CE, 2 mars 2008, n° 313915
  • C’est une garantie procédurale substantielle
    • CAA de Bordeaux ; 12 juillet 2005
    • CAA de Bordeaux 20 février 2007

Caractérisation de la "fuite"

  • La fuite est caractérisée après deux refus de déférer à une convocation
    CE, 10 décembre 2009, n° 334417
    "M. A doit être regardé comme s’étant soustrait de façon intentionnelle et systématique au contrôle de l’autorité administrative dans le but de faire obstacle à l’exécution d’une mesure d’éloignement le concernant"
  • mais pas après un seul (injonctions à engager la procédure d’asile avec autorisation de séjour)
    CE, 18 octobre 2006, n° 298101 "nonobstant la circonstance que la requérante se soit abstenue de déférer à la convocation du 28 juillet 2005 l’invitant à organiser son départ, il ne saurait être valablement soutenu que Mme A puisse être regardée comme ayant pris la fuite"
    CE, 31 décembre 2009, n° 334865 & 334866

En cas de recours suspensif, le délai court à partir de la décision juridictionnelle ayant confirmé le bienfondé de la décision

-* CJCE, 29 janvier 2009, aff. C-19/08, Migrationverket c/ Petrossian

II. Droits du demandeur d’asile au cours de la procédure

Droit à demeurer en France
Droit à des conditions de vie décentes

Fondements juridiques

Droit de tout demandeur d’asile à bénéficier de conditions matérielles d’accueil comprenant le logement, la nourriture et l’habillement ainsi qu’une allocation journalière

  • CE, 16 juin 2008, Cimade, n° 300636
  • CE, 23 mars 2009, n° 325884
    "la privation du bénéfice des mesures prévues par la loi afin de garantir aux demandeurs d’asile des conditions matérielles d’accueil décentes jusqu’à ce qu’il ait été statué définitivement sur leur demande est susceptible de constituer une atteinte grave et manifestement illégale à cette liberté".

Le demandeur en procédure "Dublin" bénéficie des mêmes droits

  • CE, 20 octobre 2009, n° 332631
    "Il ne résulte d’aucune disposition (du règlement "Dublin 2") qu’il ait entendu faire obstacle à la mise en œuvre des objectifs de la directive lorsque l’état membre qui a reçu la demande d’asile ne se considère ensuite pas comme responsable de cette demande et requiert l’état responsable de prendre en charge le demandeur ; il suit de là que l’engagement d’une procédure de prise en charge par un autre état d’un demandeur d’asile postérieurement à son entrée sur le territoire est sans influence sur le droit de l’intéressé de bénéficier de conditions matérielles d’accueil décentes tant que cette prise en charge n’est pas devenue effective".

Droit à un hébergement selon des TA

-* TA de Cayenne, réf, 18 août 2010, n° 1000548
Juge des référés (référé liberté)
L’intéressée bénéficie de l’allocation temporaire d’attente mais vit « depuis plusieurs mois sans domicile, vivant dans un squat dans une situation d’extrême précarité et [n’étant] pas en mesure de se loger dans des conditions décentes en dehors des structures d’hébergement auxquels [ils n’ont] pas pu accéder (…). L’autorité préfectorale a ainsi porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale (…) ». Il est enjoint à la préfecture d’indiquer dans un délai de 48 heures un lieu d’hébergement

Moyens de recours

Fondements juridiques

  • Règlement « Dublin 2 » art. 19 2° et 20 1° e)
    Cette décision est susceptible d’un recours ou d’une révision. Ce recours ou cette révision n’a pas d’effet suspensif sur l’exécution du transfert, sauf lorsque les tribunaux ou les instances compétentes le décident, au cas par cas, si la législation nationale le permet.

Recours en référé

  • L’urgence
    CE réf, 25 novembre 2003, n° 61913 "une décision de remise à un Etat étranger, susceptible d’être exécutée d’office en vertu de l’article 33 de l’ordonnance du 2 novembre 1945, crée pour son destinataire une situation d’urgence au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, alors même que l’administration exprime son intention d’en différer l’application effective"
  • Référé liberté : atteinte grave et manifestement illégale à l’exercice du droit d’asile
    • Le droit d’asile est l’une des libertés fondamentales
      CE réf., 12 juin 2001, Hyacinthe, n° 229029
    • La procédure Dublin n’est pas, par-elle même constitutive d’une atteinte à une liberté fondamentale
      CE réf, 3 mai 2001, n° 232997
    • Elle peut l’être pour certaines infractions aux droits en cours de procédure (voir ci-dessus).
    • ou si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités de l’État "responsable" ne répondent à l’ensemble des garanties exigées par le respect du droit d’asile
      CE, 20 mai 2010, n° 339478
    • ou en cas d’atteinte à une autre liberté fondamentale garantie par exemple par la Convention européenne des droits de l’Homme (CESDH).

III. Limites aux mécanismes de détermination de l’État « responsable »

La clause de souveraineté

Fondements juridiques

Principe reconnu par le Conseil d’État

  • CE, 6 mars 2008, n° 313915 "Considérant que le droit constitutionnel d’asile, qui a pour corollaire le droit de solliciter la qualité de réfugié, est au nombre des libertés fondamentales (...) ; que la mise en œuvre de ce droit implique la possibilité, par les autorités françaises, d’assurer le traitement d’une demande d’asile même lorsque le droit international ou communautaire lui permet de confier cet examen à un autre État ; qu’il appartient en particulier à ces autorités, sous le contrôle du juge, de faire usage de cette possibilité, prévue par le règlement du 18 février 2003 susmentionné, lorsque les règles et les modalités en vertu desquelles un autre État examine les demandes d’asile méconnaissent les règles ou principes que le droit international et interne garantit aux demandeurs d’asile et aux réfugiés ; en particulier ceux d’être admis au séjour pendant le temps nécessaire à un examen individuel de la demande, de pouvoir présenter un recours suspensif, et, une fois reconnue la qualité de réfugié, d’être effectivement protégé, notamment, comme le prévoit l’article 33 de la convention de Genève relative au statut des réfugiés, sans pouvoir être éloigné vers un pays dans lequel la vie ou la liberté de la personne est menacée".

Respect de l’article 3 de la CESDH

-* CEDH, 7 mars 2000, T.I. c/ Royaume-Uni, n° 43844/98
traduction française

Respect de l’article 8 de la CESDH

  • CE, 25 novembre 2003, n° 261913
    "En plaçant M. Y devant l’alternative, soit de quitter sa famille pour soutenir sa demande d’asile en Autriche, soit de voir celle-ci examinée en son absence pendant une durée indéterminée, les décisions susmentionnées du préfet du Rhône ont porté une atteinte grave et manifestement illégale, selon le cas, soit à son droit au respect de la vie familiale soit à son droit de bénéficier d’une procédure d’examen de sa demande d’asile conforme aux garanties qui doivent s’y attacher".
  • CE, 15 juillet 2004, n° 263501
Remises à la Pologne

Le CE confirme plusieurs remises à la Pologne :

  • CE rèf., 20 juin 2005, n° 281591
    "Considérant il est vrai que, conformément à l’article 53-1 de la Constitution, les autorités françaises ont toujours la faculté d’examiner une demande d’asile (...) ; Considérant toutefois, qu’eu égard notamment à l’absence de précisions sur les risques de persécution encourus par les requérants dans leur pays d’origine, le refus des autorités françaises de faire usage de la faculté d’examiner la demande d’asile de M. B (...) alors que cet examen incombe normalement à un autre État, ne méconnaît pas de façon manifeste le droit constitutionnel d’asile"
  • CE, 6 mars 2008, n° 313915 "les autorités polonaises paraissent, en l’état de l’instruction, offrir des garanties qui assurent aux demandeurs d’asile, qui ne sont nullement privés de liberté, la possibilité de demeurer dans cet Etat le temps que leur demande d’asile soit examinée et qui font obstacle, lorsque la qualité de réfugié ou une autre forme de protection leur est reconnue, à un refoulement vers leur pays d’origine, même via un pays tiers".
La CEDH interdit les renvois en Grèce

Rapports sur les lacunes graves dans la pratique grecque de la procédure d’asile

Condamnations de la Grèce par la CEDH

-* CEDH, 11 juin 2009, S.D. c/ Grèce, n° 5354/07

-* CEDH, 26 novembre 2009, Tabesh c/Grèce, n° 8256/07

-* CEDH, 22 juillet 2010, AA c/ Grèce, 22 juillet 2010

21 janvier 2011, arrêt de grande chambre : condamnation de la Belgique et de la Grèce pour violation des articles 3 et 13 de la convention

  • CEDH, MSS c/ Belgique et Grèce, n° 30696/09 - audience le 1er septembre 2010

    -** Conférence de presse

Décisions du Conseil d’État

  • Confirmations de décisions de remise à la Grèce, État "Dublin"
    • CE, 6 juillet 2010, n° 341055
    • CE, 6 novembre 2009, n° 332918
    • CE, 5 août 2009, n°332918
      Considérant que la Grèce est un État membre de l’Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York, qu’à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; qu’il en résulte que M. A n’est pas fondé à se prévaloir, à partir de documents d’ordre général, des modalités d’application des règles relatives à l’asile par les autorités grecques pour soutenir que sa réadmission en Grèce serait, par elle-même, constitutive d’une atteinte grave au droit d’asile.
  • Depuis 2010, prise en compte des rapports généraux mais examen au cas par cas
    • CE, 26 août 2010, n° 342683
    • CE, 20 mai 2010, n° 339478
      "Considérant, d’une part, que la Grèce est un État membre de l’Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York, qu’à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que, s’il en résulte que des documents d’ordre général relatifs aux modalités d’application des règles relatives à l’asile par les autorités grecques ne sauraient suffire à établir que la réadmission d’un demandeur d’asile vers la Grèce serait, par elle-même, constitutive d’une atteinte grave au droit d’asile, il appartient néanmoins à l’administration d’apprécier dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités grecques répondent à l’ensemble des garanties exigées par le respect du droit d’asile".

      -** CE 1er mars 2010, n° 336857

Décisions de tribunaux administratifs

  • Suspensions de décisions de remise à la Grèce concernant des exilés afghans

    -** TA, Paris, réf., 17 juillet 2009, n° 0911567/9

    -** TA, Paris, réf., 9 août 2007, n° 0712180/0/1

  • Annulations de décisions de remise à la Grèce concernant des exilés afghans

    -** TA, Paris, 15 décembre 2009, n° 0912492-3/3

    -** TA, Paris, 9 octobre 2009, n° 0911567/9

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Dernier ajout : lundi 20 juillet 2015, 16:04
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