action collective
Destruction du camp de Norrent-Fontes le 30 janvier 2012
Des associations dénoncent une action inutile et de mauvaise foi
Le camp d’infortune de Norrent-Fontes a été rasé ce lundi matin. Les 46 personnes migrantes présentes à Norrent-Fontes n’y étaient pas. Elles dormaient dans une salle où la commune a pris la responsabilité de les abriter du froid depuis le 17 décembre dernier.
Pendant qu’une entreprise privée détruisait les baraquements sous l’oeil de Monsieur le Sous-Préfet, les services de la Direction Départementale de la Cohésion Sociale (DDCS) ont fait irruption dans le dortoir et ont expliqué rapidement les faits.
Abasourdis, les migrants ont eu quelques minutes pour choisir entre un retour volontaire dans le pays qu’ils ont fui ou le dépôt d’une demande d’asile (qui pour la plupart est impossible et déclenchera leur expulsion vers un autre pays d’Europe en vertu du règlement Dublin II). Tout aussi rapidement,il leur a fallu décider s’ils voulaient rester sur place ou être hébergés dans un centre d’hébergement d’urgence. Tous ont refusé ces propositions qui ne leur sont d’aucun secours.
Nous dénonçons l’inutilité de cette opération et le désintérêt complet des services de l’État pour les personnes migrantes. Depuis plus de dix ans, des milliers de rescapés ayant fui leur pays et survécu aux pires horreurs ne doivent leur survie qu’à l’action bénévole des habitants.
Marc Boulnois, maire de Norrent-Fontes, est désigné comme fautif alors qu’il est un des rares élus à assumer sa responsabilité. Il demande depuis plusieurs années un dialogue avec l’État pour mieux répondre aux questions que pose la présence de migrants dans son village.
Dans son communiqué de presse, la préfecture ose écrire : « alerté par le Préfet à maintes reprises depuis trois ans sur l’état déplorable des installations de fortune, le maire de la commune n’a entrepris aucune démarche pour faire cesser l’existence de ce taudis ». Alerté à maintes reprises par le maire, les associations et les habitants, le Préfet n’a entrepris aucune démarche pour aider les personnes qui s’abritaient dans ce taudis. Moins d’une heure après leur arrivée, les agents de la DDCS étaient repartis sans même avoir demandé le nom de qui que ce soit !
Le préfet souligne « le non-respect par la commune des obligations réglementaires qui lui incombent ». Nous soulignons quant à nous le non-respect par l’État des obligations légales, nationales et internationales qui lui incombent.
À quoi aura servi cette spectaculaire destruction ? À faire croire à l’opinion que l’État agit ? À rendre moins visibles encore ces hommes et femmes exilés sans refuge et abandonnés dans les fossés ?
Dans quelques semaines, quand les gelées ne seront plus à craindre, les migrants quitteront la salle municipale. Pour aller où ? Ils reconstruiront des abris de fortune.
Dans tous les cas, nous serons là pour les aider à s’abriter du vent et de la pluie, nous serons là pour leur donner la possibilité de se doucher et de se soigner, pour leur permettre de se défendre, pour défendre leurs droits et leur dignité.
Premiers signataires :
- L’auberge des migrants
- Carrefour des solidarités
- Collectif de soutien des exilés de Paris
- Flandres Terre Solidaire
- Fraternité Migrants Bassin Minier
- Gisti (Groupe d’Information et de Soutien des Immigrés)
- Itinérance Cherbourg
- La Marmite aux idées
- Ligue des Droits de l’Homme – Fédération du Pas-de-Calais
- Médecins du Monde – mission migrants littoral Nord-Pas-de-Calais
- Mrap – comité local littoral
- Réseau d’Accueil des Immigrés à Lille
- Réseau éducation sans frontières
- Salam Nord-Pas-de-Calais
- Secours Catholique – délégation de Lille
- Secours Catholique – délégation du Pas-de-Calais
- Terre d’errance Flandre Littoral
- Terre d’errance Norrent-Fontes
- Terre d’errance Steenvoorde
- Le Vestiaire des Migrants
RAPPEL : L’hiver dernier, suite à la mobilisation des associations, l’État a octroyé 100 000 euros à la ville de Calais pour héberger les migrants la nuit dans le cadre du plan grand froid. En décembre 2010, ayant connaissance de cette aide, le conseil municipal de Norrent-Fontes a osé demander à l’État de soutenir également la commune puisqu’elle assume seule cet hébergement hivernal depuis 2008.
Le préfet n’a pas pardonné cette audace et a exigé la destruction du camp par une mise en demeure datée du 24 décembre 2010. Le 29 janvier 2011, plus de 500 personnes se sont déplacées pour soutenir le conseil municipal et ont contraint le préfet à changer de ton. Dans les mois qui ont suivi, l’Agence Régionale de la Santé est venue à plusieurs reprises constater d’abord que le camp était insalubre puis que le maire ne s’était pas plié à l’arrêté préfectoral lui demandant de détruire le camp.
Voir notre dossier « Jungles, campements et camps d’exilés en France »
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