La reconnaissance de la qualité de réfugié aux Palestiniens de Gaza

Le Gisti est intervenu volontairement en novembre 2024 au soutien de la requête formée devant la CNDA par une femme palestinienne à qui l’Ofpra avait refusé la qualité de réfugiée au sens de la Convention de Genève au motif qu’elle ne faisait pas état de craintes de persécutions. L’Ofpra lui avait néanmoins accordé le bénéfice de la protection subsidiaire en raison de la situation de conflit d’intensité exceptionnelle prévalant à Gaza.

Le mémoire déposé pour la requérante entend démontrer qu’elle remplit les conditions pour se voir reconnaître le statut de réfugié : les persécutions qu’elle risque de subir sont fondées sur sa nationalité, son appartenance à un groupe social et les opinions politiques qu’on lui impute.

  • Sur sa nationalité : Les risques réels et imminents d’un préjudice irréparable causé au peuple palestinien ont été reconnus par plusieurs instances internationales (experts mandatés par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, rapporteuse spéciale des Nations unies sur la situation des droits humains dans les territoires, Cour internationale de justice) ainsi que par des ONG comme Amnesty international, pouvant aller jusqu’au risque de génocide. Dès lors que l’origine palestinienne de la requérante est établie ainsi que sa provenance de Gaza, d’une part, que les instances internationales s’accordent à qualifier le conflit actuel de conflit politico-national, d’autre part, elle peut se prévaloir de craintes de persécution sur le fondement de sa nationalité.
  • Sur son appartenance à un groupe social : Au sens de la Convention de Genève le groupe social est constitué de personnes partageant (notamment) une histoire commune ou une identité propre perçue comme différente par la société environnante ou par les institutions. Ces caractéristiques s’appliquent aux habitants de la bande de Gaza.
  • En raison de ses opinions politiques : le gouvernement israélien tend en effet, pour justifier ses actions de destruction dirigées contre les cibles civiles, à assimiler l’ensemble de la population de Gaza au Hamas. Cette assimilation peut faire craindre à la requérante d’être persécutée du fait des opinons politiques qui lui sont imputées.

Il ne fait par ailleurs aucun doute que ses craintes de persécution sont réelles en cas de retour en Palestine où elle serait exposée à subir des conditions de vie inhumaines et dégradantes, allant jusqu’à la destruction physique, le risque d’être tuée ou encore de subir des violences sexuelles.

Les dispositions de la directive dite "qualification" de l’Union européenne du 13 décembre 2011 confortent le raisonnement développé plus haut. En effet :

  • Selon l’article 10§1, c) :« la notion de nationalité ne se limite pas à la citoyenneté ou à l’inexistence de celle-ci, mais recouvre, en particulier, l’appartenance à un groupe soudé par son identité culturelle, ethnique ou linguistique, ses origines géographiques ou politiques communes ».
  • Selon l’article 10§ 1, d) : « un groupe est considéré comme un certain groupe social lorsque, en particulier : — ses membres partagent une caractéristique innée ou une histoire commune qui ne peut être modifiée, ou encore une caractéristique ou une croyance à ce point essentielle pour l’identité ou la conscience qu’il ne devrait pas être exigé d’une personne qu’elle y renonce, et - ce groupe a son identité propre dans le pays en question parce qu’il est perçu comme étant différent par la société environnante ».
  • Selon l’article 10§2 : « Lorsque l’on évalue si un demandeur craint avec raison d’être persécuté, il est indifférent qu’il possède effectivement la caractéristique liée à la race, à la religion, à la nationalité, à l’appartenance à un certain groupe social ou aux opinions politiques à l’origine de la persécution, pour autant que cette caractéristique lui soit attribuée par l’acteur de la persécution ».

Il est donc demandé à la CNDA, à titre subsidiaire, au cas où un doute subsisterait sur l’applicabilité de la Convention de Genève, de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice de l’Union européenne d’une question préjudicielle.

Mémoire complémentaire
Intervention volontaire du Gisti

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Dernier ajout : vendredi 17 janvier 2025, 14:44
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