Faire reconnaître les femmes comme groupe social au sens de la convention de Genève
Le Gisti, la fédération nationale des CIDFF et le planning familial sont intervenus volontairement au soutien du recours d’une femme mexicaine devant la grande formation de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) : au-delà du cas de la requérante l’enjeu était de faire reconnaître que les femmes mexicaines constituaient un « groupe social » au sens de la convention de Genève, en raison des persécutions auxquelles elles étaient exposées en tant que femmes, et à ce titre susceptibles d’être reconnues comme réfugiées. Deux autres affaires concernant respectivement une femme afghane et une femme albanaise étaient soumises parallèlement à la Cour.
Un pas avait été fait en ce sens par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) qui, dans un arrêt du 16 janvier 2024, avait indiqué que, dans leur ensemble, les femmes pouvaient être regardées comme appartenant à un groupe social et bénéficier du statut de réfugié lorsqu’elles sont persécutées en raison de leur genre. C’était notamment le cas si, dans leur pays d’origine, elles étaient exposées, en raison de leur genre, à des violences physiques ou psychologiques, y compris des violences sexuelles et domestiques alors qu’elles devaient jusqu’alors démontrer appartenir à des groupes sociaux spécifiques tels que : victimes de la traite des êtres humains, fillettes et jeunes filles risquant l’excision, personnes persécutées du fait de leur orientation sexuelle ou identité de genre, etc.
Dans trois arrêts rendus le même jour, la CNDA a reconnu que les femmes afghanes appartenaient bien à un groupe social au sens de la Convention de Genève. Elle a en revanche refusé de reconnaître cette qualification dans le contexte du Mexique et de l’Albanie, au seul motif que ces pays avaient adopté des législations protectrices des femmes, sans se préoccuper du point de savoir si ces législations constituaient une protection effective contre les persécutions ou les craintes de persécution : « Eu égard à cet ensemble de normes juridiques adoptées par les institutions représentatives de la société mexicaine et qui traduisent l’évolution des normes sociales aussi bien que morales de cette société démocratique, les phénomènes de discrimination et de violence qui perdurent à l’encontre des femmes au Mexique ne peuvent s’analyser comme l’expression de telles normes sociales, morales ou juridiques traduisant une manière différente de percevoir les femmes par la société environnante mais, au contraire, comme des pratiques désormais réprouvées par cette société », peut-on lire dans l’arrêt concernant le Mexique.
Concernant l’affaire dans laquelle le Gisti était intervenant volontaire, la Cour a également rejeté la demande de protection subsidiaire, estimant non fondées les craintes de la requérante, originaire du Mexique, d’être exposée à des persécutions ou atteintes graves en cas de retour dans son pays d’origine.
Voir aussi :
- Communiqué du 14 juin 2024 : « Droit d’asile : la France doit protéger les femmes persécutées en raison de leur genre »
- Communiqué du 16 juillet 2024 : « Droit d’asile : la France décidément peu empressée de reconnaître les persécutions fondées sur le genre »
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