Rapport du Défenseur des droits

« Exilés et droits fondamentaux : la situation sur le territoire de Calais »

Ce rapport repose sur les éléments recueillis au cours de deux missions des services du Défenseur des droits effectuées les 16 et 17 juin puis 20 juillet 2015,

Communiqué de presse du Défenseur des droits, 6 octobre 2015

Calais : le Défenseur des droits émet des recommandations sur les difficultés d’accès aux droits fondamentaux des exilés

Les atteintes préoccupantes aux droits fondamentaux des exilés à la frontière franco-britannique ne sont pas nouvelles. Elles émaillent la chronique de l’actualité depuis une vingtaine d’années.

La première saisine dont a fait l’objet le Défenseur des droits, lors de son installation en juin 2011 concernait déjà la situation de Calais. Après plusieurs mois d’enquête et s’être rendu sur place à deux reprises, il a publié en fin 2012 une recommandation générale relative à la situation des migrants dans le Calaisis. Fin 2014, il a également émis des observations sur la mise en place, au cours de l’été 2013 d’un dispositif de filtrage de l’accès au site de distribution des repas aux migrants, à Calais. Il a été de nouveau saisi en début de l’année 2015 de plusieurs réclamations relatives à des sujets aussi divers que les difficultés d’accès aux soins ou le comportement des forces de l’ordre.

A l’occasion de deux missions menées les 16 et 17 juin, puis le 20 juillet 2015, les services du Défenseur ont rencontré les acteurs locaux, visité les principaux lieux de vie des exilés de la ville de Calais, notamment le bidonville jouxtant le centre d’accueil Jules Ferry, centre d’hébergement réservé aux femmes et aux enfants, la permanence d’accès aux soins de santé.

De cette enquête approfondie, le Défenseur des droits tire différents constats et formule plusieurs recommandations dans un rapport rendu public ce jour sur les difficultés que les exilés, maintenus à Calais contre leur gré, rencontrent dans l’accès à leurs droits fondamentaux.

Le Défenseur des droits :

  • rappelle le caractère inconditionnel du droit à l’hébergement d’urgence consacré par la loi et souligne que les autorités publiques sont tenues de proposer sans délai des solutions d’hébergement à tous les migrants contraints de vivre dans des bidonvilles. Il demande notamment qu’un inventaire des ressources foncières soit effectué ;
  • rappelle l’invitation faite aux préfets, aux termes de la circulaire du 26 août 2012 d’assurer un accompagnement aux personnes expulsées en soulignant l’obligation de garantir la continuité de la scolarisation pour les mineurs et l’accès aux soins ;
  • préconise que des moyens financiers et matériels supplémentaires soient alloués à la gestion du centre d’accueil Jules Ferry, qu’au moins dix points d’eaux supplémentaires soient installés sur la zone concernée, et qu’un dispositif régulier de ramassage des ordures soient mis en place ;
  • demande, s’agissant de l’accès aux soins que les moyens alloués à la Permanence d’accueil sanitaire et sociale (PASS) soient augmentés et qu’une « PASS mobile » soit créée pour pouvoir intervenir directement dans le bidonville ;
  • demande que soient mis en place des mesures particulières et des moyens financiers, matériels et humains pour les mineurs, isolés ou non, qui se trouvent dans le Calaisis ;
  • attire l’attention des pouvoirs publics sur l’extrême vulnérabilité des femmes présentes dans le Calaisis et recommande que soit organisée une mise à l’abri immédiate de toutes les femmes isolées présentes sur le campement. Il préconise que le nombre de places d’hébergement allouées aux femmes et à leurs enfants soient triplées.
  • déplore que les violences décrites dans son rapport de 2012 n’aient pas disparu, l’usage du gaz lacrymogène étant même devenu « fréquent » et poursuit l’instruction des réclamations qui lui ont été adressées depuis le début de l’année.

Toutefois, des réponses exclusivement humanitaires, aussi urgentes soient elles, ne sauraient suffire : Calais reste le symptôme, certes spectaculaire, des écueils de la politique migratoire de l’Union européenne tendant à la réduction des voies légales d’émigration. A cet égard, le Défenseur des droits rappelle que le droit de quitter un pays, y compris le sien, notamment pour demander l’asile, est un droit internationalement et constitutionnellement consacré.

Dans ce sens, s’il se félicite de l’ouverture depuis le début 2015 de nombreuses procédures de demande d’asile, le Défenseur des droits recommande la suspension au moins temporaire du règlement Dublin III.

Les événements de ces derniers mois, dont Calais n’est qu’une illustration, traduisent l’ardente nécessité de trouver de nouvelles réponses qui, sans renoncer aux exigences de sécurité et de lutte contre la traite des êtres humains, permettent d’accueillir ces hommes, ces femmes et ces enfants dans le respect effectif des droits fondamentaux que la France s’honore de leur reconnaître.

Communiqué
de presse
6 oct. 2015
Rapport Calais oct. 2015

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Dernier ajout : mardi 17 janvier 2017, 10:59
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