« PLEIN DROIT », LA REVUE DU GISTI

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Racisme : quand la question fait l’opinion

/ Alain Morice / Article du Plein droit n° 139, décembre 2023

Il y a presque trente ans, ici même, l’auteur évoquait le sondage annuel de la CNCDH « Les Français et la lutte contre le racisme », le suspectant de distiller le racisme dans l’opinion publique « française », plutôt qu’il ne le mesurait (telle était l’intention officielle) [2]. Qu’en est-il de cette « opinion » aujourd’hui, par quels mécanismes peut-on être amené à conforter ce que l’on prétend combattre, quelle problématique du racisme se cache-t-elle dans les questions que l’on pose et se pose ? [Lire la suite]


La fiction de la frontière : le cas de Mayotte

/ Daniel Gros / Article du Plein droit n° 139, décembre 2023

Mayotte illustre bien les effets de l’édification des frontières. 1975 : en violation des conventions internationales, cette île est séparée de l’archipel des Comores, devenu indépendant. 1995 : la circulation entre les îles est entravée par l’instauration d’un visa d’entrée à Mayotte. 2023 : enhardis par l’opération « Wuambushu » menée au nom de la lutte contre « l’habitat informel, les étrangers clandestins et la délinquance », les entrepreneurs de haine réactualisent un discours sur la « mahorité ». Retour sur ce processus de racialisation des rapports sociaux. [Lire la suite]


Mobiliser les « mots en R » ? Race, racisme, racialisation…

/ Emmanuel Blanchard / Article du Plein droit n° 139, décembre 2023

Les politiques de contrôle des frontières sont-elles racistes ? Bien peu de personnes directement concernées se risqueraient à répondre par la négative si une telle question leur était explicitement adressée. Les mêmes ne formuleraient pourtant pas tous leurs griefs en ces termes si elles n’y étaient incitées par la question. Dans cette ambivalence se niche une des multiples tensions des luttes pour les droits des étrangers et des étrangères : comment doivent-elles s’articuler avec des luttes antiracistes, lesquelles sont loin de concerner les seuls non-nationaux ? L’exigence d’une égalité (...) [Lire la suite]


Nouvel avatar de l’externalisation : l’accord Italie-Albanie

Édito du Plein droit n° 139, décembre 2023

Il y a 20 ans, Plein Droit s’inquiétait des projets européens d’installation, dans des pays non membres de l’Union européenne (UE), de « centres de transit » où seraient enfermées, le temps d’instruire leur demande d’asile, les personnes étrangères ayant franchi illégalement les frontières de l’Union. Évoquant un « cauchemar », l’édito dénonçait l’intention des États membres « de se dégager des responsabilités que la Convention de Genève sur les réfugiés fait peser sur eux », ajoutant : « On devine au prix de quelles pressions, économiques ou non, ces pays accepteront ou se feront imposer ces camps de transit, […] on (...) [Lire la suite]


Surveiller, punir, expulser

/ Inna Chokri, Marc Duranton, Julien Fischmeister / Article du Plein droit n° 138, octobre 2023

Le fantasme de la personne étrangère plus délinquante que les autres a la vie dure : « C’est un fait que les vols à la tire sont à 70% le fait d’étrangers. Ils seront expulsés automatiquement », affirmait déjà, sans prendre la peine de sourcer son affirmation, le ministre de l’intérieur Michel Poniatowski en 1976 [33]. « Il y un taux de délinquance parmi la population étrangère qui est entre deux et trois fois supérieur à la moyenne », lui répondait 35 ans plus tard son successeur Claude Guéant, en 2012, sans plus de précaution [34]. Jusqu’au président de la République actuel, qui assénait en 2022 qu’« à Paris, (...) [Lire la suite]


Contrôles frontaliers : l’ère des drones

Édito du Plein droit n° 138, octobre 2023

Le 7 septembre 2023, les préfets du Nord, du Pas-de-Calais et de la Somme adoptaient un arrêté interdépartemental autorisant l’emploi de caméras installées à bord d’aéronefs « dans le cadre de la mission de lutte contre l’immigration clandestine en zone Nord ». Il permet, durant 3 mois, l’utilisation de 76 caméras embarquées à bord de drones, avions et hélicoptères afin de surveiller une large bande côtière de 5 km s’étendant, hors agglomération, sur 150 km de Mers-les-Bains à Bray-Dunes. Peut notamment être mobilisé, pour la surveillance nocturne, l’avion de la société privée, prestataire de la police aux (...) [Lire la suite]


Une réforme qui penche vers les extrêmes

Édito du Plein droit n° 137, juin 2023

La réforme de l’immigration et de l’asile, dans les tuyaux depuis un an, va-t-elle voir le jour avant Noël ? Nous pourrions nous amuser à reprendre les déclarations du président de la République et de la Première ministre, qui ont annoncé tantôt la reprise des débats sur le projet, tantôt leur report : des fameux « 100 jours » pour relancer le quinquennat, dont le projet faisait partie intégrante, à l’annonce du report à l’automne de la discussion, le temps d’évaluer les forces politiques, en passant par le saucissonnage du texte séparant les « dispositions consensuelles » sur l’asile et le (...) [Lire la suite]


Mourir. Puis disparaître ?

/ Lisa Carayon & Carolina Kobelinsky / Article du Plein droit n° 137, juin 2023

Mourir parce qu’on vieillit Ils ne devaient pas rester ici. Les migrants « accueillis » dans l’après-guerre, par une France en mal de bras, auraient dû repartir. Mais c’était sans compter la vie qui se construit, les enfants qui naissent, les amis que l’on perd au pays et, tout simplement, le temps qui passe. Alors ils ont vieilli ici, ces immigrés (forcément au masculin) qui n’étaient considérés que comme des travailleurs et, par conséquent, n’étaient pas censés mourir. Ce fut le temps de la mobilisation pour les Chibanis et Chibanias et, pour le Gisti, le point de départ d’un numéro de Plein (...) [Lire la suite]


En Espagne, des syndicats populaires face aux violences mortifères

/ Félicien de Heusch / Article du Plein droit n° 137, juin 2023

Le harcèlement policier à l’encontre des vendeurs sénégalais à la sauvette a causé plusieurs décès en Espagne. Pour honorer leur mémoire, protester contre les violences policières et faire reconnaître leur statut de travailleurs, les manteros se sont constitués en syndicats. Très visible, la mobilisation dépasse largement les rangs des sans-papiers. Mais sans qu’elle n’obtienne justice. [Lire la suite]


Garder trace des luttes à Calais

/ Maël Galisson et Mathilde Pette / Article du Plein droit n° 137, juin 2023

À Calais, de quoi se souvient-on après plus de trente années de fermeture de la frontière franco-britannique ? Face à la politique de « table rase » des autorités soucieuses d’invisibiliser la présence des personnes exilées, la reconstitution d’une histoire militante et politique de cet espace frontalier s’impose peu à peu comme un mode d’action militante à part entière. La lutte s’engage aussi sur le terrain mémoriel pour produire un récit collectif solidaire, alternatif à la représentation sécuritaire de ce territoire. [Lire la suite]


L’asile à Mayotte : racisme à découvert

Édito du Plein droit n° 136, mars 2023

Depuis des mois, des personnes réfugiées, venues pour la plupart de la région des Grands Lacs en Afrique, vivent à la rue, négligées par un État qui contrevient à ses obligations internationales. Elles se regroupent contre les façades de l’immeuble de Solidarité Mayotte, association à laquelle la préfecture a confié la mission d’accueil et d’accompagnement des demandeurs d’asile. Cela se passe à Mamoudzou, chef-lieu d’un département d’outre-mer réputé pour son niveau d’insécurité. Qu’importe si la loi du 29 juillet 2015 prévoit que soient proposés aux populations demandant la protection internationale un (...) [Lire la suite]


L’étranger, un justiciable indésirable

Article du Plein droit n° 136, mars 2023

Dans un article paru dans Plein droit en octobre 2012 [80], Claire Saas, universitaire et membre du Gisti, dénonçait le morcellement et la complexité du droit des étrangers et leurs conséquences en termes d’insécurité juridique pour le justiciable. Une décennie plus tard, le constat ne fait qu’empirer, avec une dimension nouvelle : le sentiment de ras-le-bol – si ce n’est à l’égard de l’étrangère ou de l’étranger, au moins du contentieux qu’il génère – des juges chargés d’apprécier la régularité des décisions administratives qui lui font grief. Lors de l’audience solennelle d’octobre 2019, madame Sichler, (...) [Lire la suite]


La délivrance des visas rattrapée par l’idéologie sécuritaire

/ Loïc Bourgeois et Fleur Pollono / Article du Plein droit n° 136, mars 2023

Face à une politique des visas devenue un implacable outil de régulation de l’immigration, la justice est amenée à annuler 40% des décisions de refus dont elle est saisie. Mais la multiplication des obstacles dressés par l’administration dans le parcours d’une population fragilisée par la distance et la suspicion la rend inaccessible à l’immense majorité des personnes qui se voient refuser un visa d’entrée en France. [Lire la suite]


Le droit de vote des résidents étrangers : un combat sans fin

/ Mohamed Ben Saïd, Bernard Delemotte et Vincent Rebérioux / Article du Plein droit n° 136, mars 2023

Depuis les années 1970, la participation des personnes étrangères aux élections locales a été plusieurs fois promise mais toujours écartée par un pouvoir politique frileux ou hostile. Trois membres du collectif J’y suis, j’y vote retracent les étapes du long combat pour le droit de vote des étrangers qui, cinquante ans plus tard, n’est pas terminé. [Lire la suite]


L’accident du travail : généalogie de pratiques discriminatoires

/ Pierre Rogel et Stéphanie Séguès / Article du Plein droit n° 135, février 2023

Cet article entend soumettre le cadre légal des accidents du travail à l’épreuve des pratiques des caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) dans l’instruction du caractère professionnel des événements accidentels dont sont victimes les travailleurs sans papiers ou dont le travail est dissimulé. Sur la base de notre activité et de notre expérience professionnelle au Collectif des accidentés du travail, handicapés et retraités pour l’égalité des droits (Catred), nous nous poserons la question suivante : là où la loi prévoit l’égalité de traitement entre tous les travailleurs, les pratiques administratives n’introduisent-elles pas des différenciations qui confinent à une discrimination systémique ? [Lire la suite]


Le volet « travail » de la réforme : une vraie nouveauté ?

Édito du Plein droit n° 135, décembre 2022

Le dossier proposé dans le présent numéro tombe à pic. En effet, le projet de loi « pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration [107] » – déposé au Conseil d’État le 19 décembre 2022 et qui sera discuté début 2023 – doit entre autres venir modifier la réglementation concernant l’accès des personnes étrangères au travail salarié… Le projet de loi comporte plusieurs chantiers, comme celui de la prétendue simplification du contentieux, ou encore une aggravation de la double peine, avec la fin de la protection au titre des attaches en France pour les personnes étrangères qui auront commis des (...) [Lire la suite]


À la croisée de nos revues, les droits des travailleurs étrangers

/ Anne Braun, Violaine Carrère, Nathalie Ferré et Carole Giraudet / Article du Plein droit n° 135, décembre 2022

Au printemps 2021 a surgi l’idée de réaliser un numéro commun à nos deux revues, que d’emblée on a nommé symboliquement « Plein droit ouvrier », consacré à la question des travailleurs étrangers. Cette idée a alors séduit autant l’équipe de Droit ouvrier que le comité de rédaction de la revue du Gisti. La construction du dossier principal est une « œuvre » réellement collective, rendant compte de sensibilités partagées sur le traitement réservé auxdits travailleurs. Au lecteur attentif des revues, n’échapperont pas quelques libertés prises avec le format habituel des articles ou avec leur construction, (...) [Lire la suite]


Capitalisme de plateforme : les travailleurs sans papiers toujours en bout de chaîne

/ Barbara Gomes* / Article du Plein droit n° 135, décembre 2022

Lorsque l’on évoque le capitalisme de plateforme, vient immédiatement en tête le nom d’une entreprise : Uber. En une dizaine d’années à peine, le modèle qu’elle incarne a su s’imposer dans les habitudes de consommation de millions de consommatrices et de consommateurs à travers le monde, inspirant à la fois fascination et répulsion au regard de l’ébranlement que son développement a provoqué dans les secteurs d’activités concernés. Le phénomène est tel qu’en France, du nom cette entreprise est né un nouveau nom commun et son adjectif qui s’appliquent à toutes les plateformes fonctionnant sur le (...) [Lire la suite]


Surchauffe sécuritaire à l’Intérieur

Édito du Plein droit n° 134, octobre 2022

« Un étranger qui a commis des actes graves, lorsqu’il remplit certaines conditions, n’est pas expulsable », déplore M. Darmanin dans une interview au Monde le 9 juillet 2022 [152]. Et d’assurer qu’il va s’employer à faire cesser cette incongruité. De ce qu’il entend par « actes graves », on ne saura pas grand-chose. Mais il se saisit de l’occasion pour enfourcher un des thèmes de prédilection de l’extrême-droite, et, depuis la dernière campagne présidentielle, de la droite dite républicaine : la prétendue « surreprésentation des étrangers dans la délinquance ». Selon le ministre, les (...) [Lire la suite]


Le sans contact, nouvelle norme du service public

/ Danièle Lochak / Article du Plein droit n° 134, octobre 2022

Que le public étranger soit la victime par excellence du mauvais fonctionnement de l’administration, chacun en est conscient. Aux dysfonctionnements induits par une politique générale de réduction du nombre d’agents publics, qui affecte particulièrement les plus précaires, s’ajoutent, dans le cas des personnes étrangères, les conséquences d’une politique délibérée, quoique non avouée, de dissuasion. Elle se traduit par la multiplication des obstacles mis à l’obtention d’un droit au séjour, à l’enregistrement d’une demande d’asile ou de l’accès aux conditions matérielles d’accueil. Sans même parler de la (...) [Lire la suite]


Les risques de la dématérialisation : l’alerte du Défenseur des droits

/ Elsa Alasseur / Article du Plein droit n° 134, octobre 2022

Autorité administrative indépendante, le Défenseur des droits est investi de la double mission de défendre les droits et de les promouvoir [178]. Ses délégués sont aux premières loges pour constater les atteintes aux droits des étrangers dans leurs relations avec le service public, notamment du fait de la dématérialisation : refus de rendez-vous, délai excessif de traitement des demandes, absence de voie alternative au numérique. Le « droit souple » dont relèvent les interventions et les décisions de l’institution, s’avère efficace par endroits, mais a ses limites. Il ne remplace pas le contentieux, mais il peut l’appuyer et contribuer à produire du « droit dur ». [Lire la suite]


L’Ofii : maltraitance administrative !

Édito du Plein droit n° 133, juin 2022

Une fois n’est pas coutume, un coup de colère en guise d’édito : parce que parfois, la colère, c’est non seulement tout ce qui nous reste, mais aussi ce qui est le plus susceptible de nous porter, y compris vers de nouvelles luttes. [Lire la suite]


Les Roses d’Acier : précaires, stigmatisées et engagées

/ Hélène Le Bail / Article du Plein droit n° 133, juin 2022

Réunissant des migrantes chinoises travailleuses du sexe, le collectif Les Roses d’Acier se mobilise depuis 2014 contre les arrestations policières, les lois de pénalisation de la prostitution et en faveur d’actions communautaires visant à réduire les risques de violence et d’isolement. À travers cette mobilisation, ces femmes s’entraident, affirment la complexité de leurs parcours de vie au-delà du seul travail du sexe et font entendre une voix qui leur est propre. [Lire la suite]


Réparer les mineurs

/ Solène Plana & Hinde Maghnouji / Article du Plein droit n° 133, juin 2022

Cette contribution, fruit d’un dialogue entre une juriste et une psychologue, questionne et rend compte de l’interconnexion de ces deux disciplines dans le cadre de la prise en charge de mineures et mineurs étrangers isolés dans un service d’hébergement du Val-de-Marne. Ces professionnelles proposent d’analyser l’interdépendance entre les aspects administratifs et la santé mentale de ces jeunes, en partant des parcours de trois d’entre eux qu’elles ont été amenées à accompagner. [Lire la suite]


Réfugiés d’Ukraine : tapis rouge pour les uns, barbelés pour les autres

Édito du Plein droit n° 132, mars 2022

Février 2022 : face à l’afflux d’exilé·es en provenance d’Ukraine aux frontières européennes, la présidente de la Commission européenne déclare que l’Union est « pleinement préparée » à accueillir ces réfugiés qui sont « les bienvenus [179] ». En France, la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur précise qu’il n’est prévu ni répartition entre les États membres de l’UE (« ce sont des personnes libres, elles vont là où elles veulent [180] ») ni quotas (« dès lors que des besoins seront exprimés, la France y répondra ») : sera octroyé un statut provisoire de protection immédiate, sans besoin de demander l’asile, (...) [Lire la suite]


Un continuum foyer-résidence et des discriminations qui perdurent

/ Claire Lévy-Vroelant et Aïssatou Mbodj-Pouye / Article du Plein droit n° 132, mars 2022

Depuis vingt-cinq ans, la transformation des foyers de travailleurs migrants (FTM) est programmée et leur fin annoncée [186]. Un plan national de traitement des foyers* a été mis en place en 1997, visant à les remplacer par des résidences sociales* composées essentiellement de studios et destinées à des personnes en difficulté de logement. Ce processus met fin au système prévalant depuis les années 1950 d’un logement dédié aux travailleurs immigrés résidant en France sans leur famille. Mais la temporalité de la transformation des foyers en résidences sociales s’effiloche. Envisagé comme (...) [Lire la suite]


La double stigmatisation des résidents des foyers

/ Ali El Baz / Article du Plein droit n° 132, mars 2022

Contrôles à répétition de la « résidence effective », décisions arbitraires lourdes de conséquences au quotidien, pratiques discriminatoires : la vie des résidents des foyers est une vie sous surveillance soumise à des tracasseries administratives permanentes. Ali El Baz, ancien coordinateur de l’association des travailleurs maghrébins en France (ATMF), membre du collectif pour l’avenir des foyers (Copaf) et du Gisti, fait part ici de son expérience. [Lire la suite]


Dispersion des campements : flagrant délit de détournement de la loi… par un procureur

/ Patrick Henriot / Article du Plein droit n° 132, mars 2022

Depuis qu’ont été menées, en 2015 et 2016, les opérations d’évacuation des milliers d’habitant·es de la « jungle » de Calais, les gouvernements successifs ont appliqué avec constance une politique de dispersion systématique des campements et autres installations précaires où les exilé·es tentent de survivre en attendant de poursuivre leur route. Dès le 23 octobre 2016, le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve annonçait une « stratégie globale pour éviter qu’un point de fixation ne se reforme [203] ». Depuis lors, tous ses successeurs ont repris l’expression à leur compte et, avec elle, les méthodes brutales (...) [Lire la suite]


Droit au séjour et santé mentale : évolution et enjeux

/ Francis Remark & Arnaud Veïsse / Article du Plein droit n° 131, décembre 2021

L’analyse historique des modalités de la reconnaissance des besoins de protection et de soins en France pour les exilé·es montre l’empreinte des volontés politiques. « Droit au séjour pour raison médicale », l’expression signale d’emblée deux logiques différentes : d’une part, la question du droit au séjour des étrangers, qui est au cœur des politiques d’immigration depuis 40 ans ; et d’autre part celle du droit à la santé, elle-même au cœur du débat public depuis l’émergence de la pandémie de Covid. C’est de la tension entre ces deux logiques que dépend, depuis plus de 20 ans, l’application effective de ce droit (...) [Lire la suite]


Des passeurs bien commodes

Édito du Plein droit n° 131, décembre 2021

Le récent drame dans la Manche n’y aura pas échappé. Le jour du décès de 27 migrants, dans une funeste ritournelle désormais bien connue, on aura entendu sur toutes les ondes l’habituel discours sur les passeurs : « principaux responsables », « organisation mafieuse », « criminels qui exploitent la misère des gens ». Et de jouer sur l’émotion en précisant : « il y a des femmes enceintes, des enfants qui sont morts hier, dans cette embarcation de fortune. Pour quelques milliers d’euros on exploite ces personnes pour leur promettre l’eldorado en Angleterre [233] ». Le coupable idéal est ainsi (...) [Lire la suite]


La parole en souffrance et son discrédit

/ Laure Wolmark & Marie-Caroline Saglio-Yatzimirsky / Article du Plein droit n° 131, décembre 2021

Le psychotraumatisme constitue une catégorie nosographique dont la reconnaissance a évolué tant sur le plan social que dans la communauté scientifique. Cependant, les exilés souffrant de ces troubles ne profitent pas de cette évolution favorable, particulièrement en matière de droit au séjour pour raison médicale. À l’origine de cette exclusion se trouve le discrédit porté sur la parole des exilé·es, un discrédit qui concerne non seulement la procédure d’asile mais aussi les pratiques d’évaluation des troubles psychiques dans l’instruction des dossiers. [Lire la suite]


Résistance à l’expulsion : l’enfermement pour horizon

/ Marie Laigle / Article du Plein droit n° 131, décembre 2021

Malgré la pandémie de Covid, les centres de rétention n’ont jamais été fermés et l’exigence d’un test PCR pour franchir les frontières a été perçue comme un obstacle supplémentaire à l’organisation des expulsions par l’administration, a fortiori si la personne s’y oppose. Nouvelle étape de la pénalisation des résistances à l’expulsion, les autorités ont fait du refus de se soumettre au test de dépistage un motif légal d’emprisonnement. En comparution immédiate, la justice banalise le continuum de l’enfermement. [Lire la suite]


Muraille d’Europe

Édito du Plein droit n° 130, novembre 2021

À ce stade, nous n’avons assisté à aucun vaste mouvement d’Afghans franchissant les frontières de leur pays », constate, le 10 septembre, Filippo Grandi, Haut Commissaire des Nations unies pour les réfugiés [243]. Le même qui, quelques jours auparavant, avait alerté sur la probabilité d’un exode de 500 000 personnes avant la fin de l’année [244] . Même son de cloche du côté de l’Organisation internationale pour les migrations, dont le directeur général, Antonio Vitorino, explique, le 13 septembre, qu’autant ses équipes sur le terrain enregistrent « des niveaux élevés de déplacements internes (...) [Lire la suite]


Mobilités étudiantes internationales : l’attractivité de la France

/ Lama Kabbanji, Antonina Levatino et Sorana Toma / Article du Plein droit n° 130, novembre 2021

Sixième pays d’accueil des étudiants étrangers à l’échelle internationale, et troisième en Europe derrière le Royaume-Uni et l’Allemagne [253], la France s’est engagée depuis 2018 dans la mise en place d’une nouvelle « stratégie d’attractivité pour les étudiants internationaux », dénommée « Bienvenue en France » – réponse supposée au constat d’un ralentissement des mobilités étudiantes vers le pays. Comment la place relative de la France a-t-elle évolué ces deux dernières décennies dans un contexte international de compétition accrue pour ce type de migrants ? Et quelles sont les raisons qui conduisent les étudiants (...) [Lire la suite]


« Bienvenue en France » : attirer… ou trier ?

/ Marion Tissier-Raffin / Article du Plein droit n° 130, novembre 2021

Faire payer plus cher pour attirer davantage : telle est la nouvelle stratégie, aussi paradoxale qu’inégalitaire, d’accès à l’enseignement supérieur appliquée aux personnes étrangères souhaitant étudier en France. D’un revers de la main, les juridictions ont balayé l’action contentieuse menée par les associations étudiantes et les résistances des universités qui y voient une violation des principes de gratuité et d’égal accès à l’instruction. Les étudiants internationaux les moins solvables comme les universités en font déjà les frais. [Lire la suite]


« Left-to-die boat » : dix ans d’obstruction judiciaire

/ Patrick Henriot / Article du Plein droit n° 130, novembre 2021

Mars-avril 2011 : une embarquation surchargée d’exilé·es fuyant la Libye en proie à la guerre civile dérive sur la Méditerranée. Malgré la présence de nombreux navires d’une coalition internationale coordonnée par l’Otan, aucun ne leur portera secours, abandonnant à la mort 63 des occupant·es de l’embarcation. À la lente dérive de leur bateau a succédé la lente dérive d’un dossier d’instruction dans lequel aucune investigation sérieuse ne sera entreprise pendant dix ans. Autopsie d’un fiasco judiciaire… toujours en cours. [Lire la suite]


Quand un des garde-frontières de l’Europe se rebiffe

Édito du Plein droit n° 129, juin 2021

« Crise des migrants à Ceuta : il est temps de sortir d’une certaine naïveté dans le regard porté sur le Maroc » titrait l’éditorialiste du Monde pour commenter le franchissement, par plusieurs milliers de personnes, le 17 mai dernier, de la frontière qui sépare le Maroc de la ville de Ceuta, l’une des deux enclaves espagnoles encastrées dans le territoire marocain. On se demande qui fait le plus preuve de naïveté : l’Union européenne (UE), invitée un peu plus loin, « au nom d’une amitié qui doit rester exigeante, à signifier au Maroc […] que la défense de ses intérêts légitimes ne doit pas (...) [Lire la suite]


Calais ou l’escalade répressive

/ Maël Galisson / Article du Plein droit n° 129, juin 2021

La frontière entre la France et le Royaume-uni est le résultat d’un long processus politique et administratif. Trente-cinq années de négociations et pas moins de vingt et un traités, accords et arrangements entre les deux pays ont été consacrés à la mise en place et au développement de mesures de contrôle et de surveillance toujours plus sophistiquées. Vidéosurveillance, barbelés coupants, drones, caméras thermiques et même déforestation et inondation de certaines zones, autant de techniques destinées à rendre la route migratoire « impraticable ». Pour quel bilan ? Un marché juteux pour les multinationales de l’armement et de la sécurité ; un coût humain considérable ; des passeurs de plus en plus indispensables. [Lire la suite]


Reprendre la Manche ou la « crise des traversées »

/ Corporate Watch, Watch the Channel / Article du Plein droit n° 129, juin 2021

Reprenons quelques chiffres : les arrivées par small boats sont passées de 539 en 2018 à 1 844 en 2019, 8 400 en 2020 [269]. En 2020, les personnes ayant utilisé ce moyen pour entrer en Grande-Bretagne représentaient cependant toujours moins d’un quart des demandes d’asile, dont la demande globale a d’ailleurs diminué de 20 % par rapport 2020 [270]. Mais ni les faits ni les chiffres n’ont d’importance quand, une fois de plus, c’est une « crise » à la frontière de Calais qu’identifient les médias de droite et le gouvernement. Comme en 1998 pour le camp de Sangatte, ou en 2015 pour la jungle de Calais, les (...) [Lire la suite]


« Liberté (d’association), j’écris ton nom »

Édito du Plein droit n° 128, mars 2021

Les temps sont durs pour les libertés. Après le projet de loi sur la sécurité globale, un second texte, « confortant le respect des principes de la République [275] », menace particulièrement les associations dans leur droit d’expression et d’opinion. Selon l’article 6 du projet adopté le 16 février, par l’Assemblée nationale, « [t]oute association ou fondation qui sollicite l’octroi d’une subvention […] auprès d’une autorité administrative […] s’engage, par un contrat d’engagement républicain, à respecter les principes de liberté, d’égalité, de fraternité et de respect de la dignité de la personne humaine (...) [Lire la suite]


La figure de l’apatride, immuable et changeante

/ Danièle Lochak / Article du Plein droit n° 128, mars 2021

« Le terme apatride désigne une personne qu’aucun État ne considère comme son ressortissant par application de sa législation », énonce simplement la Convention de 1954 relative au statut des apatrides. Cette sobriété est conforme à la représentation que l’on se fait couramment de l’apatridie : un phénomène trop résiduel pour retenir l’attention. Il a fallu que, dans la foulée des attentats de novembre 2015, soit évoquée l’idée d’inscrire la déchéance de la nationalité française dans la Constitution et de rendre passibles de cette sanction les personnes n’ayant pas d’autre nationalité pour que l’apatridie soit (...) [Lire la suite]


1981, l’incendie de New Cross, un tournant dans l’histoire des Noirs britanniques

/ Mogniss H. Abdallah / Article du Plein droit n° 128, mars 2021

Dans la nuit du 17 au 18 janvier 1981, l’incendie d’une maison au 439 New Cross Road, dans le sud de Londres, provoque la mort de 13 jeunes Noirs et en blesse 27 autres. Qui a mis le feu ? On ne le sait toujours pas. À la suite d’une enquête inaboutie, la police est mise en cause pour son déni de toute motivation raciste. Le « New Cross Massacre » suscite un immense émoi et une mobilisation dans tout le pays, culminant avec le Black People’s Day of Action, qui rassemble 20 000 personnes. Quelques semaines après éclatent les émeutes de Brixton. Ces événements vont accélérer les changements pour la reconnaissance des communautés noires dans la société britannique. [Lire la suite]


L’apatridie dans le Golfe : temporiser et marchander

/ Claire Beaugrand / Article du Plein droit n° 128, mars 2021

Au lendemain des indépendances dans les pays du Golfe, des dizaines de milliers de personnes, souvent nomades et bientôt désignées par le terme bidun, ont été exclues de la nationalité des nouveaux États, dans lesquels elles pouvaient pourtant vivre depuis des décennies. Dans ces pays où les populations étrangères l’emportent sur les nationaux, les voies de la naturalisation sont tellement étroites qu’elle en devient impossible, maintenant les biduns en situation d’apatridie. Pour remédier à ce phénomène, des solutions pour le moins originales ont été envisagées sans qu’un débat de fond ne soit impulsé. [Lire la suite]


La violence comme seul horizon politique

Édito du Plein droit n° 127, décembre 2020

Inacceptable ; c’est le mot qu’a utilisé le préfet de police de Paris, à propos de l’« occupation illicite » de la place de la République après que des exilé·es y ont installé une centaine de tentes, pour justifier la violence rare avec laquelle a été menée, le 24 novembre, leur « dispersion ». Sans doute estimait-il « acceptable » que plusieurs centaines de personnes qui n’avaient pas été prises en charge une semaine auparavant, lors de l’évacuation du campement dans lequel elles survivaient depuis plusieurs semaines porte de Paris, à Saint-Denis, soient privées de toit, contraintes à l’errance et exposées au (...) [Lire la suite]


Régulariser les sans-papiers... dans le monde d’après

/ Violaine Carrère / Article du Plein droit n° 127, décembre 2020

L’épisode de la Covid-19 au printemps 2020 a fait surgir tribunes, prises de position et même éléments de langage (« premiers de corvée ») au moment où il apparaissait que nombre des salariés exemptés de confinement se trouvaient être aussi sans papiers. Et la crise sanitaire aura contribué aussi à mettre en évidence leur rôle dans nombre de secteurs qui ne pourraient pas fonctionner sans leur concours. Ce contexte si particulier sera-t-il l’occasion de repenser non seulement leurs conditions de travail mais surtout leur accès à des droits pleins et entiers ? [Lire la suite]


Dans les foyers, une protection au conditionnel

/ Interview d’Ali El Baz, membre du Gisti et du Copaf / Article du Plein droit n° 127, décembre 2020

Caractérisés par une forte promiscuité, les foyers de travailleurs migrants se retrouvent être les lieux avec le plus fort taux de prévalence de la Covid-19. Difficiles à mettre en œuvre, les consignes sanitaires fixées par les notes ministérielles ou préfectorales y sont souvent restées lettre morte ou appliquées avec laxisme par des sociétés gestionnaires prenant prétexte de l’absence de personnel, lui-même confiné. Sans accès aux espaces collectifs, privés des liens de solidarité, les chibanis les plus âgés ont été abandonnés, comme le montre Ali El Baz, membre du Collectif pour l’avenir des foyers. [Lire la suite]


En Italie, le sale boulot de l’intégration

/ Simone di Cecco / Article du Plein droit n° 126, novembre 2020

Au tournant des années 2000, alors que l’Italie s’interroge sur l’intégration des immigré·es, les programmes de bénévolat à destination de ces populations font florès dans toute la péninsule du fait d’un consensus entre les municipalités, les associations impliquées dans le système d’asile et les entreprises sociales qui assurent l’hébergement. Aujourd’hui, ce sont les personnes en procédure d’asile qui sont visées, leur disponibilité au travail gratuit constituant une preuve irréfutable de leur mérite civique et de leur volonté d’intégration. Pourtant, un tel engagement «  volontaire  » imposé à une catégorie particulièrement précaire de la population pose question. [Lire la suite]


L’exception Emmaüs

/ Tiphaine Guignat / Article du Plein droit n° 126, octobre 2020

La loi pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie du 10 septembre 2018 a donné la possibilité aux 3 000 compagnes et compagnons « sans-papiers » d’Emmaüs d’obtenir une carte de séjour sur la base de leur expérience au sein des communautés. Un an et demi après l’entrée en vigueur des textes, Emmaüs France constate que leurs chances de régulariser leur situation sont très disparates en fonction des préfectures. [Lire la suite]


Les régularisations, composantes des politiques migratoires

/ Sara Casella Colombeau / Article du Plein droit n° 126, octobre 2020

Au fil des ans, et plus nettement encore depuis le milieu des années 2000, les grandes opérations de régularisation se sont raréfiées, avec pour conséquence l’allongement des durées pendant lesquelles les personnes étrangères sont maintenues dans l’illégalité. Les gouvernants considèrent que le coût politique et administratif de ces régularisations collectives est trop élevé et que les sorties de l’illégalité doivent dorénavant s’opérer de manière quasi confidentielle, préfecture par préfecture, dossier par dossier. Le mot lui-même devient tabou et on préfère parler d’« admission exceptionnelle au séjour ». Ce (...) [Lire la suite]


Contre les migrants, l’Europe pactise avec les milices

Édito du Plein droit n° 126, octobre 2020

Depuis janvier 2020, 20 000 migrant·es sont arrivé·es en Italie, dont plus de 11 000 en provenance de Libye et près de 9 000 de Tunisie ; environ 3 000 boat people ont accosté à Malte. Dans le même temps, plus de 8 000 personnes ont été livrées aux garde-côtes libyens par le mécanisme de « refoulement par procuration » qui consiste, pour l’Italie, à fournir les moyens techniques d’intervenir sans avoir à le faire elle-même. On ne saura jamais combien sont décédé·es en chemin mais 600 morts ont été décomptées en Méditerranée. Entre le 17 et le 20 août, quatre naufrages ont fait 100 mort·es ou disparu·es. En (...) [Lire la suite]


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Dernier ajout : vendredi 4 août 2006, 18:28
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