action collective

Mission sur les immigrés âgés : trois ans après, rien n’a fondamentalement changé

Plusieurs associations, dont la Fasti et le Gisti, ont été auditionnées dans le cadre d’un suivi des propositions émises en 2013 par la mission d’information de l’Assemblée nationale sur les immigrés âgés [1].

La mise en place de cette mission, en 2013, avait été un signal positif, marquant un changement de climat après des années de stigmatisation des immigrés âgés souvent désignés comme des fraudeurs et soumis à des contrôles indignes de la part des organismes sociaux [2] : si des pratiques de harcèlement ont continué depuis lors [3], d’autres traduisent une attitude plus respectueuse du droit des personnes.

Cependant, les 82 propositions dévoilées en 2013 lors de la sortie du rapport de la mission étaient décevantes, se situant très en-deçà du diagnostic de qualité effectué par les parlementaires à propos des conditions de vie de nombreux immigrés âgés et des causes des difficultés qu’ils rencontrent pour la plupart d’entre eux. Même mises en œuvre, les propositions du rapport ne pourraient améliorer leur situation de manière significative : certaines, conçues dans le cadre de l’austérité budgétaire, rendent illusoire la possibilité d’améliorer réellement leur situation économique et sociale. D’autres se limitent à rappeler aux organismes sociaux le droit existant, par exemple au sujet de la condition de résidence sur le territoire qui est exigée pour le maintien des droits sociaux.

Mais surtout, aucune suite n’a été donnée à de nombreuses revendications formulées par des immigrés âgés, les associations les soutenant [4] ou le Défenseur des droits [5]. Tel est le cas notamment de la demande de suppression de la « préférence nationale » déguisée, en vertu de laquelle le minimum vieillesse (allocation de solidarité aux personnes âgées - ASPA) est accordé seulement si l’intéressé justifie de titres de séjours depuis au moins 10 ans. Or, la preuve de cela peut s’avérer difficile à établir, voire impossible [6]. De même, il aurait été légitime de fixer le principe de la portabilité des prestations, tels le minimum vieillesse et l’assurance maladie, en révisant la condition de résidence effective sur le territoire français, alors que les bénéficiaires ont souvent des attaches aussi bien en France, où ils ont travaillé, que dans leur pays d’origine. Enfin, sont restées lettre morte, les demandes de moratoires sur les créances réclamées par des organismes sociaux à la suite de contrôles excessifs et discriminatoires des personnes immigrées âgées [7].

Certaines propositions sont les bienvenues, telle la possibilité pour les titulaires d’une carte mention « retraité » de pouvoir de nouveau obtenir une carte de résident. Mais nous regrettons que d’autres avancées aient été conçues de manière restrictive et que leur mise en œuvre s’avère difficile en pratique. C’est le cas en matière d’acquisition de la nationalité française pour les immigrés âgés qui sont parents d’enfants français, d’attribution de la carte de résident permanent, d’aide à la réinsertion sociale et familiale (ARFS) ou encore de contrôle de la résidence pour le maintien des prestations sociales.

Nous déplorons que les bonnes intentions initiales de la mission n’aient encore trouvé qu’un faible écho, certainement du fait de la logique de suspicion et d’exclusion qui prévaut encore. Il est temps de cesser de harceler et discriminer les personnes immigrées âgées.

13 juin 2016

Signataires  : Fasti et Gisti.

Audition de la Fasti et du Gisti sur les immigrés âgés, 23 mai 2016

Voir notre dossier « La protection sociale et les étrangers »

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Dernier ajout : mardi 28 juin 2016, 12:45
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