E. Autres formes d’intimidations

1. Code de procédure pénale

Article 40
Le procureur de la République reçoit les plaintes et les dénonciations et apprécie la suite à leur donner conformément aux dispositions de l’article 40-1.
Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.

Article 40-1
Lorsqu’il estime que les faits (...) constituent une infraction commise par une personne dont l’identité et le domicile sont connus et pour laquelle aucune disposition légale ne fait obstacle à la mise en mouvement de l’action publique, le procureur de la République territorialement compétent décide s’il est opportun :
1° Soit d’engager des poursuites ;
2° Soit de mettre en œuvre une procédure alternative aux poursuites (...) ;
3° Soit de classer sans suite la procédure dès lors que les circonstances particulières liées à la commission des faits le justifient.

2. Rappels à la loi

Il arrive que le parquet renonce à donner une suite judiciaire à une procédure engagée pour aide à l’entrée ou au séjour irrégulier d’un étranger sous réserve que la personne à qui ces faits sont reprochés ne commette aucune infraction dans un délai d’une ou plusieurs années.
Un officier de police judiciaire établit alors un "rappel à la loi" signé par lui-même et par l’intéressé.

  • 24/12/2009, Dunkerque, rappel à la loi
    Le diacre de la commune de Bollezeele, et aumônier des prisons à Dunkerque, a été entendu pendant deux heures à la police aux frontières de Dunkerque le 15 décembre. Il avait tenté de curer un fossé à la pelleteuse dans les dunes du port autonome de Dunkerque, à Loon-Plage, fin novembre, avec un copain entrepreneur de pompes funèbres. Il voulait détourner l’eau qui avait inondé le campement de fortune d’une cinquantaine de migrants afghans et irakiens, après les pluies de l’automne. Le port a déposé plainte. Motif, il aurait pu abîmer les canalisations. Le procureur de Dunkerque, Philippe Muller, a estimé que Jean-Marie Devulder ne serait « pas poursuivi dans l’immédiat », et ferait l’objet d’un « rappel à la loi ». Le magistrat précise qu’on ne reproche pas au diacre « d’aider les gens » et qu’il a été entendu « comme témoin ».
    Information de « Libération.fr », 24 décembre 2009
  • 4/11/2009, Villefranche-sur-Saône, rappel à la loi
    Rappel à la loi d’une Française avoir facilité, par aide directe ou indirecte, le séjour irrégulier d’un étranger "en l’hébergeant et en lui procurant des subsistances".
    Le couple se connaissait depuis plus d’un an, cohabitait depuis six mois et souhaitaient de marier ; madame était enceinte. Malgré cela, la mairie avait engagé la procédure prévue par l’article 175-2 du code civil en cas de mariage susceptible d’être "blanc".
    • Convocation pour rappel à la loi le 4/11/2009 auprès du parquet du TGI de Villefranche-sur-Saône :
    • Copies de démarches effectuées par l’avocat après du maire et du Procureur de la République :
  • 08/04/2009, Metz, rappel à la loi*
    CA Metz, 6 avril 2009


    Rappel à la loi d’une Française à qui il est reproché d’avoir "facilité, par aide directe ou indirecte, le séjour irrégulier d’un Pakistanais en l’hébergeant et en lui procurant un moyen de déplacement".
    Pas de suite judiciaire à la condition de ne commettre aucune infraction pendant 3 ans (notification).

  • 28/10/2009, Toulouse, rappel à la loi
    Une Camerounaise, en situation régulière, hébergeait depuis quelques mois une compatriote sans papiers souffrant d’une grave maladie oculaire au titre de laquelle elle a fait une demande de titre de séjour.
  • 23/10/2008, Toulouse, rappel à la loi*
    CA Toulouse, 23 octobre 2008


    En octobre 2008, un Marocain en séjour irrégulier est interpellé et reconduit à la frontière. Il est interpellé chez une jeune Française avec laquelle il vivait en concubinage depuis deux mois. Celle-ci fait l’objet d’un rappel à la loi (notification).
    Elle souhaite alors épouser son ami et se rend au Maroc le mois suivant. A son arrivée, elle est victime d’un très grave accident de voiture. Devenue paraplégique, elle est rapatriée d’urgence vers la France mais refuse de partir si le jeune homme ne l’accompagne pas ; le consulat de France délivre alors le visa. Deux mois après leur retour en France, le couple se marie à l’hôpital.

3. Maires délinquants ?

  • Lettre ouverte au Préfet du Pas-de-Calais en solidarité avec les élus de la Commune de Norrent-Fontes, Vendredi 23 mars 2012
    Marc Boulnois, ancien maire de Norrent-Fontes a reçu le 22 février 2012 une injonction afin d’intégrer le démantèlement d’un camp de migrant au budget de la commune dans le délai d’un mois. Le préfet du Pas-de-Calais a également évoqué la possibilité d’une saisine de la Chambre Régionale des Comptes. En effet, le maire refusait depuis plusieurs mois d’organiser le démantèlement d’un camp de fortune installé sur le territoire de sa commune. Si le préfet invoque l’insalubrité et le trouble à l’ordre public dans sa mise en demeure, le maire considère que ces raisons sont un prétexte pour stigmatiser d’avantage encore les migrants. La lettre dénonce la pression exercée sur les élus locaux tentant d’exercer leurs responsabilités avec éthique.
  • Lettre du préfet de l’Oise aux maires, 25 juillet 2007
    Lettre du préfet de l’OIse aux maires


    Résumé :
    Certaines opérations de « parrainage » organisées en divers points du territoire par des associations ou des groupes de fait dits « collectifs » à l’intention d’étrangers en situation irrégulière peuvent entrer dans le champ d’application de l’article L. 622-1 du Ceseda et partant de l’article 40 du Code de procédure pénale.

  • Lettre du préfet de Seine-Saint-Denis aux maires, 11 septembre 2007
    Lettre du préfet du 93 aux maires


    Extraits :
    Dans le cadre des opérations de « parrainage » il a pu être constaté que des cartes de « protection citoyenne » ou des cartes tricolores ont été remises à des ressortissants étrangers en situation irrégulière. Ces documents constituent un élément caractérisant l’aide à l’entrée et au séjour irréguliers.

  • Lettre du préfet de la Gironde adressée à Michèle Delaunay, députée de la Gironde, 14 septembre 2007
    Mentionnée par un message envoyé le 20 avril 2009 par Michèle Delaunay, députée de la Gironde à l’association Terre d’Errance
    Lettre de la députée de la Gironde à Terre d’Errance
  • Question d’Éric Raoult (UMP) au ministre de l’intérieur sur la validité juridique et le caractère irresponsable des parrainages des sans-papiers - JO du 14 juin 2005, p. 6087
    Cette pratique provocatrice et manipulatrice qui vise à parrainer des personnes étrangères sans-papiers est inadmissible, car elle est une forme de désobéissance civile qui va à l’encontre des mesures gouvernementales de meilleur contrôle des flux migratoires. Ces parrainages sont des entraves au travail des services qui contrôlent ces flux migratoires, ils sont autant de marques de désaveu et de blocage du travail des forces de police et des fonctionnaires affectés aux services spécialisés en ce domaine. Ces pratiques symboliques sont autant de signaux dangereux, dans les pays d’origine, à l’égard des candidats à l’immigration clandestine qui peuvent ainsi espérer une quasi-protection officielle par des élus locaux qui marquent ainsi une irresponsabilité regrettable. Ces parrainages de « sans-papiers » sont donc fallacieux et dangereux et devraient donc être interdits et poursuivis. (...)
  • Réponse du ministère de l’intérieur - JO du 1 août 2008, p. 8153
    (...) Aux termes de l’article L. 622-1 du code précité, la peine de cinq ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende est susceptible d’être prononcée à l’encontre de « toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers d’un étranger en France », sous réserve des dispositions de l’article L. 622-4 relatives aux immunités accordées aux membres de famille.
    Toutefois, ces dispositions ont essentiellement pour objet de donner les moyens juridiques de lutter contre les réseaux organisés d’immigration clandestine. Ainsi, dans sa décision n° 2004-DC du 2 mars 2004 relative à la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, dite « loi Perben II », qui a caractérisé un délit d’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irréguliers d’un étranger en France commis en bande organisée, le Conseil constitutionnel a souligné que « ce délit ne saurait concerner les organismes humanitaires d’aide aux étrangers » et que « s’applique à la qualification d’une telle infraction le principe énoncé à l’article 121-3 du code pénal selon lequel il n’y a point de délit sans intention de le commettre ».
    Il est permis de conclure de la réserve d’interprétation exprimée par le Conseil constitutionnel que le parrainage d’élus en faveur d’étrangers en situation irrégulière ne saurait caractériser à lui seul l’infraction d’aide à l’entrée et au séjour irréguliers et ne peut de ce fait justifier de poursuites pénales.

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Dernier ajout : samedi 7 novembre 2015, 12:25
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