Article extrait du Plein droit n° 27, juin 1995
« Dénoncer et expulser »
Une police de l’immigration
En créant la DICILEC (Direction centrale de contrôle de l’immigration et de lutte contre l’emploi clandestin) qui sera chargée d’animer et de coordonner l’action des services de la police nationale en matière de lutte contre l’immigration irrégulière et l’emploi des clandestins, et en installant à sa tête Robert Broussard, le ministre de l’Intérieur fait d’abord un geste symbolique puisqu’il dote la France d’une police spécialisée de l’immigration et qu’il l’érige de surcroît en direction à part entière au sein de la Direction générale de la police nationale.
Mais l’objectif poursuivi n’est pas seulement symbolique. En effet, si elle succède à la police de l’air et des frontières (PAF), créée en 1973, la DICILEC se voit confier une mission plus large dans le cadre d’une stratégie globale : alors que le rôle de la PAF était essentiellement consacré, dans les aéroports et aux frontières terrestres et maritimes, à la surveillance transfrontière, la DICILEC, elle, aura pour objet, outre la surveillance des frontières, la lutte contre l’emploi des étrangers en situation irrégulière et l’éloignement des personnes en situation irrégulière ou menaçant l’ordre public.
La mission de surveillance des frontières se trouve elle-même transformée dans ses modalités puisqu’elle doit s’exercer désormais en tenant compte des nouvelles règles de circulation dans l’Europe de Schengen. Le contrôle ne s’exerce plus seulement ni même principalement à la frontière, mais aussi en amont de la frontière et en aval sur l’ensemble du territoire.
Il est expressément prévu que des policiers de la DICILEC seront détachés aux frontières extérieures de l’espace Schengen ou affectés dans les pays sensibles en vue d’exercer une mission préventive aux frontières, en amont des principales filières d’immigration. Inversement, des contrôles d’identité pourront être effectués, pour vérifier la détention des titres de voyage, dans les zones frontalières – c’est-à-dire dans les zones comprises entre la frontière terrestre de la France avec les États parties à la Convention et une ligne tracée à 20 km en deçà – et dans les zones des ports, aéroports et gares routières et ferroviaires ouvertes au trafic international.
La lutte contre l’emploi des clandestins, qui n’avait jusqu’à présent jamais été considérée comme une priorité par la police – sauf à Paris où une section des renseignements généraux en était spécialement chargée –, doit constituer une autre mission importante de la DICILEC.
Pour remplir ses missions, la DICILEC voit ses structures renforcées, tant au niveau central que territorial, par rapport à celles de la PAF, et ses effectifs, qui s’élevaient à 6 370 fonctionnaires à la fin de l’année 1994, selon son directeur, devraient eux aussi logiquement s’accroître.
La création de la DICILEC est donc l’une des pièces d’un dispositif global au service d’une politique qui a explicitement inscrit parmi ses priorités la maîtrise des flux migratoires et la lutte contre le travail clandestin.
Les missions de la DICILEC
(Extrait du Rapport au Premier ministre sur le projet de décret portant création de la direction générale de la police nationale, de la direction centrale du contrôle de l’immigration et de la lutte contre l’emploi des clandestins). |
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