Article extrait du Plein droit n° 2, février 1988
« Logement : pourquoi des ghettos ? »

Lexique en matière de réhabilitation des quartiers anciens

Les quartiers anciens se sont beaucoup dégradés ces dernières années, faute de dynamisme des propriétaires et du marché du logement. Phénomène d’autant plus regrettable que le patrimoine ancien, principalement habité par de vieilles couches de population urbaine, a toujours joué un rôle social de fait.

La rénovation urbaine, plus connue sous la forme d’opérations bulldozers, s’est traduite, sous couvert de lutte contre l’insalubrité, par une véritable déportation des habitants des centres vers les quartiers HLM de périphérie. Mais elle a aussi nécessité la mobilisation de masses financières considérables, en totale inadéquation avec les moyens réels de l’État.

C’est ce constat qui a conduit les pouvoirs publics, à partir de 1975, à promouvoir, à la suite des rapports Nora-Éveno et Raymond Barre [1], de nouvelles mesures de restructuration des centres villes, dont les principales orientations sont contenues dans la loi du 3 janvier 1977 relative à l’aménagement des centres et des quartiers urbains existants. Cette loi a défini les moyens nouveaux d’une politique d’amélioration des quartiers anciens et permis le lancement de plus de 1 000 opérations sur toute la France en un peu plus de 10 ans. De l’article de presse au rapport de recherche en passant par les bilans d’opérations et de nombreuses prises de position, ces opérations ont suscité une littérature abondante. Nous proposons pour notre part une esquisse de bilan de 10 ans d’application de cette réforme ainsi qu’un lexique donnant quelques définitions commentées.

Rénovation : on rase et on reconstruit.

Restauration : concerne les immeubles ayant un intérêt artistique ou historique.

Réhabilitation : vise simplement à transformer les conditions d’habitation des immeubles, notamment par leur mise en conformité avec les normes d’habitabilité minimales.

Restructuration (d’un quartier) : opération associant les trois types ci-dessus.

Aménageurs

Les collectivités locales peuvent mener les opérations elles-mêmes, en faisant agir leurs propres services techniques, ou faire appel à des organismes spécialisés, dont on repère trois types principaux :

– les SEM (sociétés d’économie mixte), dépendant principalement du groupe de la Caisse des Dépôts et Consignations ;

– les OPAC (offices publics d’aménagement et de construction), offices publics d’HLM, ayant obtenu la compétence d’aménageur en urbanisme ;

– les ARIM (associations de restauration immobilière), associations loi 1901 créées par les PACT. Les PACT étant des associations à vocation sociales créées à partir de 1945 pour l’amélioration des conditions de vie des mal-logés.

Les modalités d’intervention de chacun de ces organismes dépendent pour partie de leurs savoir-faire : les SEM ont souvent réalisé de grosses opérations d’aménagement (ZUP – zones à urbaniser en priorité –, centres directionnels…) et donnent souvent la primeur à une réhabilitation lourde. Les OPAC, souvent gestionnaires d’un gros patrimoine de logements sociaux, sont influencés par les difficultés qu’ils y rencontrent, et revendiquent également une réhabilitation de qualité tout en étant sensibles à l’occupation des logements après travaux. Les ARIM en revanche tirent du savoir-faire des PACT une tendance à des travaux tenant plus compte de ce qui existe, à une intervention plus fine. C’est la commune qui choisit en général son aménageur.

Procédures d’urbanisme

OPAH  : Opération programmée d’amélioration de l’habitat.

D’initiative publique, elle s’appuie uniquement sur le volontariat des propriétaires. Ceux-ci sont incités à faire des travaux par des moyens financiers : subventions de l’Agence Nationale d’Amélioration de l’Habitat (ANAH) dont le fonds est alimenté par une taxe payée par les propriétaires sur les loyers, prêts conventionnés et du 1 %, et par des déductions fiscales ; ils bénéficient en outre d’une aide technique à la maîtrise d’ouvrage et au relogement des locataires.

En échange, ils signent une convention avec l’État qui limite pendant sa durée (en moyenne 9 ans) le montant des loyers et ouvre droit à l’APL pour les locataires. Depuis juin 1986, la convention n’est plus obligatoire, ce qui fait perdre une lourde part de l’intérêt social de l’OPAH surtout là où la pression des promoteurs est forte.

Une OPAH dure 3 ans, non renouvelable. Elle ne permet que la réhabilitation.

ZAC  : Zone d’Aménagement Concerté.

La totalité du périmètre de la zone à aménager est concernée par l’opération. En outre, la collectivité publique (commune, département,…) agit en concertation avec les autres partenaires. Elle achète les immeubles et les terrains, indemnise les propriétaires, reloge les habitants qui y ont droit (et quelquefois en fonction de sa bonne volonté, ceux qui n’y ont pas droit), et revend des droits à construire. L’équilibre entre logements sociaux et privés, locatifs ou en accession à la propriété dépend de l’équilibre financier (les droits à construire étant plus faibles pour le logement social) et de la volonté politique locale, qui décide du montant de sa participation au bilan.

– La RHI (Résorption de l’Habitat Insalure) donne des moyens financiers supplémentaires en cas d’insalubrité reconnue en fonction des critères édités par la loi Vivien (loi du 10 juillet 1970). Ce dispositif très intéressant par les moyens qu’il dégage pour le relogement des habitants est en fait très lourd : la durée de montage de dossier lui fait perdre une bonne part de son attrait.

– Le PRI (Périmètre de Restauration Immobilière), s’appuie comme l’OPAH sur l’initiative des propriétaires. Mais ici, les incitations sont purement fiscales, elles n’intéressent donc que les propriétaires qui paient suffisamment d’impôts, et qui doivent en outre se regrouper en AFU (Association Foncière Urbaine) pour bénéficier des dispositifs du PRI. C’est une procédure peu efficace, notamment au plan social.

DPU (Droit de préemption urbain)

Le DPU est une prérogative de puissance publique reconnue par la loi aux communes dotées d’un P.O.S. (Plan d’Occupation des Sols), leur permettant de prendre une option et ainsi de pouvoir s’opposer, à leur profit, à la vente des terrains bâtis ou non bâtis des zones urbaines ou d’urbanisation future situées sur leur territoire.

Ce droit s’exerce pendant une durée légale maximum de quatorze ans et doit être utilisé pour des réalisations d’intérêt général (espaces verts, logements sociaux…) ou pour la constitution de réserves foncières. De ce fait, chaque vente d’immeubles ou de logement fait l’objet, de la part du propriétaire, d’une déclaration d’intention d’aliéner, à partir de laquelle la collectivité peut exercer ou non son droit de préemption. Elle peut ainsi se constituer un patrimoine destiné au relogement temporaire des habitants, à être rétrocédé à un organisme de logement social, ou à empêcher une vente à caractère spéculatif. Principale limite à l’exercice de ce droit de préemption : les moyens financiers que la collectivité locale peut ou veut y mettre. En outre, les promoteurs privés y voient un frein considérable à leur liberté d’agir.

Le DPU remplace les anciennes Zones d’Aménagement Différé (ZAD) et Zones d’Intervention Foncière (ZIF).

Financements

– L’ANAH (Agence Nationale pour l’Amélioration de l’Habitat) distribue aux propriétaires privés ayant loué leur logement pendant au moins les deux premières années de subventions à hauteur d’environ 30 % de la dépense d’amélioration du confort (les parties communes sont peu concernées). Ce taux peut être majoré à 40 % dans les OPAH. L’agence distribue également aux propriétaires occupants une prime à l’amélioration de l’habitat (PAH).

– les PLA (Prêts Locatifs Aidés), financement classique du logement social, permettant aux organismes HLM d’acquérir et réhabiliter des immeubles anciens. Des PLA à taux moins intéressants sont offerts aux investisseurs privés. L’utilisation de PLA implique la signature de conventions avec l’État qui limitent les loyers et ouvrent droit à l’APL.

– Les prêts conventionnés, à taux plus élevés, sont distribués par les banques, l’État prenant en charge une partie des intérêts (bonification). Toutes les catégories de propriétaires peuvent en bénéficier.

– Le 1 % logement, appelé dans les textes « contribution des employeurs à l’effort de construction », est une somme d’argent versée par les entreprises privées de plus de 10 salariés à des collecteurs (Comités Interprofessionnels du Logement, CIL) et constitué en fonds auquel les constructeurs peuvent faire appel pour compléter leur montage financier. En contrepartie des prêts du 1 %, une partie des logements construits est réservée aux salariés des entreprises cotisantes.

Tous ces financements publics ou aidés par l’État impliquent une conformité des logements à des normes minimales d’habitabilité qui imposent l’installation de trois éléments de confort (WC, Salle d’eau, chauffage) dans des conditions définies par les textes.

APL (Aide personnalisée au Logement) Il s’agit comme son nom l’indique non pas d’un financement du logement, mais d’une allocation de logement issue de la loi du 3 janvier 1977, versée aux locataires des logements conventionnés quels que soient leur âge et leur situation familiale [2]. Le pouvoir d’achat de l’APL est supérieur à celui de l’allocation logement ordinaire pour les familles nombreuses et/ou à faibles ressources, pour tenir compte des montants de loyer plus élevés provenant des financements issus de cette loi.




Notes

[1Rapports Nora-Éveno sur l’amélioration de l’habitat ancien (1975) et rapport R. Barre sur l’intervention publique en matière de financement du logement. (1975)

[2Voir article p. 8 sur les résultats de la mise en place de l’APL dans les foyers.


Article extrait du n°2

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Dernier ajout : mercredi 2 avril 2014, 15:32
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