C. Attestations d’hébergement à des sans-papiers SDF

Faux et usage de faux” ou "fausse déclaration par personne physique"

  • Code pénal, art. 441-1
    Constitue un faux toute altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice et accomplie par quelque moyen que ce soit, dans un écrit ou tout autre support d’expression de la pensée qui a pour objet ou qui peut avoir pour effet d’établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant des conséquences juridiques.
    Le faux et l’usage de faux sont punis de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
  • Code pénal, art. 441-6
    Le fait de se faire délivrer indûment par une administration publique ou par un organisme chargé d’une mission de service public, par quelque moyen frauduleux que ce soit, un document destiné à constater un droit, une identité ou une qualité ou à accorder une autorisation est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.
    Est puni des mêmes peines le fait de fournir sciemment une fausse déclaration ou une déclaration incomplète en vue d’obtenir ou de tenter d’obtenir, de faire obtenir ou de tenter de faire obtenir d’une personne publique, d’un organisme de protection sociale ou d’un organisme chargé d’une mission de service public une allocation, une prestation, un paiement ou un avantage indu.

Irresponsabilité pénale

  • Code pénal, art. 122-7 N’est pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui menace elle-même, autrui ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien, sauf s’il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace.

2018

7 ans de harcèlement juridique après deux attestations d’hébergement : condamnation à 500 Euros d’amende avec sursis

>> Voir la chronologie détaillée et des commentaires

  • Les attestations datent de 2012.
  • TA du Havre, 3 octobre 2013
    Condamnation à 500€ d’amende avec sursis
    Le prévenu et le procureur font appel.
  • Cour d’appel de Rouen, 8 septembre 2014, n° 13/01418
    La Cour constate l’irresponsabilité pénale.
    CA de Rouen, 8 août 2014

« Quand bien même l’imprimé de l’administration et ses exigences ne correspondent pas aux textes réglementaires, la fausseté des attestations litigieuses d’hébergement constatée par le premier juge est indiscutable.
La responsabilité pénale du prévenu doit cependant s’apprécier en fonction du danger actuel ou imminent menaçant la bénéficiaire des attestations, et du caractère proportionné à la gravité de la menace, de l’acte commis en sauvegarde. »

Celle-ci "avait présenté une demande d’admission pour raison médicale reconnue par l’Agence régionale de santé" et "devait joindre à son dossier une attestation d’hébergement, de sorte que la rédaction de fausses attestations établies dans un but purement humanitaire est exactement proportionnée à la menace d’expulsion toujours persistante".

  • Le procureur fait appel et renvoie vers la Cour de cassation.
    CA de Rouen, pourvoi en cassation du procureur, 19 septembre 2014
  • Cour de cassation, 20 mai 2015, V14-86.554 FS-D
    La Cour casse et annule la décision de la Cour d’appel de Rouen et renvoie à la Cour d’appel de Caen
    Cour de cassation de Paris, 20 mai 2015

« Attendu que, selon [l’art.122-7 du code pénal] seule la nécessité de la sauvegarde d’une personne ou d’un bien face à un danger actuel ou imminent est de nature à justifier la commission de l’infraction, sauf s’il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace. »
[...] « en prononçant, sans caractériser l’état de nécessité, la cour d’appel a méconnu le texte susvisé. D’où il suit que la cassation est encourue. »

  • Cour d’appel de Caen, 23 novembre 2016, n° 16/592
    La Cour décide la relaxe et la fin des poursuites.
    CA de Caen, 23 novembre 2016

« En l’espèce, c’est la preuve de l’existence de l’élément intentionnel des infractions reprochées au prévenue qui fait défaut. [...] En présence de l’imprécision du texte dans le cadre duquel il savait que son intervention s’inscrivait, le prévenu a pu légitimement croire, dans sa démarche dont le caractère bénévole et exceptionnel n’est pas discuté, que malgré ses termes pré-imprimés, la portée de l’attestation qu’il établissait était celle d’un attestation de domiciliation en non d’une attestation d’hébergement. »

  • 15 décembre 2016, le procureur fait appel et renvoie vers la Cour de cassation.
    CA de Caen, pourvoi en cassation du procureur, 15 décembre 2016
  • 19 décembre 2017, Cour de cassation, n°16-87570
    La Cour casse et annule toutes des décisions de l’arrêt rendu ) Caen et renvoie l’affaire devant la cour d’appel d’Amiens.

« Attendu [...] que la cour d’appel en déduit qu’en présence de l’imprécision du texte dans le cadre duquel il savait que son intervention s’inscrivait, le prévenu a pu légitimement croire, dans sa démarche d’aide dont le caractère bénévole et exceptionnel n’est pas discuté, que malgré ses termes pré-imprimés, la portée de l’attestation qu’il établissait était celle d’une attestation de domiciliation et non d’une attestation d’hébergement ;
Mais attendu qu’en l’état de ces motifs contradictoires, dont il résulte que le prévenu a reconnu avoir, dans un document intitulé " attestation d’hébergement ", certifié sur l’honneur héberger l’intéressée alors que ce n’était pas le cas, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision »
 ;

  • 3 septembre 2018, cour d’appel d’Amiens : La cour a suivi les réquisitions en juin du parquet général, confirmant ainsi la condamnation prononcée en octobre 2013 par le tribunal correctionnel du Havre (AFP du 3/9/2018), donc une amende de 500 € avec sursis.

Voir le communiqué de la LDH49 : Contre les délinquants solidaires,la justice française prend le temps de l’acharnement, 3 avril 2018

2015

Dijon, attestations d’hébergement à des demandeurs d’asile

  • 27 janvier 2015, Dijon, rappel à la loi
    Un membre de la LDH de Dijon est convoqué au tribunal pour un « rappel à la loi ». Il lui est reproché d’avoir fourni cinq attestations d’hébergement à des demandeurs d’asile.
    • Communiqué du Collectif de Soutien aux migrants, Dijon
      [...], quand ils déposent une demande de régularisation de leur situation, les demandeurs d’asile et migrants doivent prouver le département où ils résident. Il leur faut pour cela une attestation d’hébergement, ce qui est difficile voire impossible à fournir quand l’État ne remplit pas ses obligations d’hébergement et que ces personnes se retrouvent à la rue. Pour pallier les carences des pouvoirs publics ce sont souvent des militants, des bénévoles, de simples citoyens solidaires de ces personnes en difficulté qui remplissent ces attestations qui ont pour seule fonction de déterminer le lieu de traitement du dossier. Dans ce cas précis qui vaut des poursuites à un militant, les attestations ont permis notamment à une adulte et à un enfant atteints de pathologies mettant leur vie en danger d’être en situation de bénéficier de soins !
2013

Domiciliations administratives d’adhérents de la Coordination 75 des Sans Papiers à Paris

  • CA de Paris, 19 avril 2013

Défenseur des droits, Décision 2017-305, 28 novembre 2017

A l’appui des auteurs de ces attestations d’hébergement, il est possible de faire état de la la décision suivante du Défenseur des droits souligne l’illégalité de nombreuses exigences préfectorales.

Les refus de nombreuses préfectures d’instruire les demandes d’admission ou de renouvellement d’admission au séjour de personnes sans domicile stable sont contraires à la loi, à la Constitution ainsi qu’à plusieurs textes internationaux ratifiés par la France et constituent une discrimination prohibée au sens de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008,

Saisi par un collectif d’associations, d’une réclamation relative aux refus de nombreuses préfectures d’instruire les demandes d’admission ou de renouvellement d’admission au séjour de personnes sans domicile stable ne pouvant fournir, comme justificatif de domicile exigé par les textes, qu’une attestation d’élection de domicile par un centre communal d’action sociale ou un organisme agréé (domiciliation administrative),

Constate que de tels refus sont contraires à la loi, à la Constitution ainsi qu’à plusieurs textes internationaux ratifiés par la France et constituent une discrimination prohibée au sens de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008,

Décide de formuler les recommandations suivantes, comme l’y autorise l’article 25 de la loi organique n°2011-333 du 29 mars 2011 :

  • Recommande au ministère compétent de prendre toutes les mesures utiles, par voie de circulaire notamment, pour faire cesser les pratiques préfectorales litigieuses et s’assurer que les attestations d’élection de domicile soient acceptées comme justificatif de domicile dans le cadre des démarches préfectorales d’admission ou de renouvellement d’admission au séjour,
  • Recommande dans ce but au ministère compétent de faire modifier le guide de l’agent d’accueil des ressortissants étrangers en préfecture, les formulaires de demandes de titre de séjour utilisés par les services préfectoraux, les informations disponibles sur les sites internet des administrations placées sous sa responsabilité et sur les autres sites officiels définissant la notion de justificatif de domicile - tels www.service-public.fr - pour que les attestations d’élection de domicile y apparaissent comme un justificatif de domicile recevable dans le cadre des démarches d’admission ou de renouvellement d’admission au séjour,

Demande à être tenu informé des suites données à ces recommandations dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision.

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Dernier ajout : vendredi 26 octobre 2018, 14:42
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