Recours contre le décret du 30 janvier 2019 relatif à l’évaluation et au fichage des mineurs isolés

Dix-neuf organisations, dont l’Unicef, ont déféré au Conseil d’État le décret n° 2019-57 du 30 janvier 2019 « relatif aux modalités d’évaluations des personnes se déclarant mineures » et « autorisant la création d’un traitement de données à caractère personnel relatif à ces personnes ».

Ce décret a été pris sur le fondement du nouvel article L. 611-6-1 du Ceseda, introduit par la loi du 10 septembre 2018 qui prévoit la possibilité de relever et de conserver en mémoire dans un traitement automatisé les empreintes digitales ainsi qu’une photographie des « ressortissants étrangers se déclarant mineurs », renvoyant à un décret la mise en place de ce dispositif de fichage.

Tel est donc l’objet du décret attaqué dont les organisations requérantes demandent l’annulation et, dans l’attente d’une décision au fond, la suspension. Contestant la constitutionnalité de la disposition législative qui lui sert de fondement, elles demandent au Conseil d’État de soumettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité tendant à faire reconnaître l’inconstitutionnalité de l’article L. 611-6-1 du Ceseda. Le Conseil constitutionnel ne s’est en effet pas prononcé sur cet article, dans sa décision du 6 septembre 2018, malgré une sollicitation en ce sens par le biais d’un amicus curiae déposé par le Gisti et la Ligue des droits de l’Homme.

Il est donc fait grief au décret de méconnaitre l’impératif de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant ainsi que son droit à la dignité et au respect de sa vie privée. Sont en particulier critiquées l’intervention du préfet dans la procédure d’évaluation qui conduit à faire prévaloir la police des migrations sur la protection de l’enfance et l’insuffisance des garanties entourant la mise en mémoire de données personnelles.

Par une ordonnance du 3 avril 2019 le juge des référés a rejeté la demande de suspension, estimant qu’aucun des moyens soulevés dans la requête n’était propre, en l’état de l’instruction, à créer un « doute sérieux » quant à la légalité du décret attaqué.

Examinant l’affaire au fond, le Conseil d’Etat a fait droit à la demande des organisations requérantes tendant à ce que la question prioritaire de constitutionnalité soit transmise au Conseil constitutionnel.

Celui-ci, par une décision rendue le 26 juillet 2019, a validé la disposition contestée. L’affaire est donc revenue devant le Conseil d’État.

Par une décision du 5 février 2020, le Conseil d’État a rejeté la requête, refusant notamment de faire droit aux arguments fondés sur l’existence d’une présomption de minorité (pour une analyse critique de cette décision, voir le communiqué)

Décret du 30 janvier 2019
Requête en référé-suspension
Requête en annulation
Demande de QPC
Ord. référé du 3 avril 2019
CE 15 mai 2019 transmission QPC
Observ. complém. déposées le 22 janvier 2020
Conseil d’Etat, 5 février 2020, Unicef et autres


Voir aussi les communiqués :

[retour en haut de page]

Dernier ajout : vendredi 7 février 2020, 09:48
URL de cette page : www.gisti.org/article6102